Dans un contexte national peu porteur, les banques sont de plus en plus sollicitées. Avec l’adoption de la norme IFRS 9, le risque d’impayés sera présent davantage dans les comptes. Et pourtant, pas de cadeau fiscal pour 2019.
La grille de l’IS progressif a été retouchée dans le cadre du projet Loi de Finances 2019 mais le taux de l’impôt sur les sociétés de 37% applicable aux établissements de crédit n’a pas bougé d’un iota (contre un taux de droit commun qui pourrait leur être de 32%). Soit un différentiel de 5%.
Si l’on prend l’exemple des banques, qu’est-ce qui les empêchent de revendiquer un alignement sur le taux de droit commun comme le veut l’équité et la justice fiscale, grands postulats de droit fiscal ?
Dans un contexte où justement les banques sont de plus en plus exhortées à contribuer à la relance économique et à l’inclusion financière, un allègement de l’impôt sur les sociétés serait souhaitable.
Elles sont également sollicitées pour l’apurement des arriérés de l’Etat en matière de crédit TVA. Le partenariat public-privé clamé haut et fort par le ministre des finances Mohammed Benchaâboun, lors du dernier Conseil des ministres, pour sortir la situation économique des sentiers battus concerne aussi les banques en vue de favoriser l’investissement privé.
Le premier semestre 2018 n’a pas été un exercice facile pour le secteur aussi bien sur le plan international que national marqué par un environnement peu porteur difficile à gérer avec une croissance faible essentiellement en ce qui concerne les crédits et dépôts. A fin juin 2018, l’encours global des dépôts de la clientèle du secteur a régressé de 0,41% à 712,5 Mds de DH.
Le flux des créances en souffrance a nettement progressé pour peser d’un poids important dans l’additionnel total du crédit distribué. Ces créances en souffrance illustrent les difficultés de remboursement de la part des agents à besoin de financement. Elles sont la preuve des difficultés que rencontrent les opérateurs économiques, entreprises et ménages. Un risque qui pèse continuellement sur le système d’exploitation des banques.
En plus de l’imposition qui sort du droit commun, les banques sont fréquemment contrôlées et les vérifications sont sanctionnées par des redressements salés.
Autre écueil et pas des moindres
D’aucuns considèrent que le redressement fiscal résulte essentiellement de la non-harmonisation entre les dispositions fiscales et les règles de provisionnement bancaire. Il semble ainsi que le décalage existant entre la réalité économique et fiscale les pénalise.
A l’occasion d’une rencontre, le gouverneur de Bank Al-Maghrib avait attiré l’attention sur ce décalage ayant fait l’objet d’une requête auprès de l’administration fiscale depuis pratiquement 10 ans.
Le gouverneur était clair à ce sujet : « Les banques n’ont pas intérêt à surestimer les provisions, car elles sont suivies par la Bourse, par les actionnaires, par les autorités de contrôle… ». Et d’ajouter : « La Direction des impôts ne peut appliquer les mêmes règles à une petite entreprise qu’à une banque. Les banques disposent même de leur propre plan comptable ».
La Circulaire N° 5/2017 publiée par la DGI en février 2017 a apporté des clarifications importantes en relation avec les provisions pour créances en souffrance en admettant la déductibilité fiscale des provisions relatives aux créances dont le montant ne dépasse pas 2.500 DH, et ce dans la limite de 1% du montant global des provisions brutes de l’exercice. Toutefois, cette tolérance n’est pas du goût des banquiers dans la mesure où elle ne résout pas le problème de déductibilité fiscale des créances douteuses et pré-douteuses.
Aujourd’hui avec l’adoption de la norme IFRS 9, le risque d’impayés sera présent davantage dans les comptes des banques et fera l’objet de provisionnement selon des standards non conformes à ceux préconisés par la DGI.
L’entêtement de l’administration est incompréhensible si l’on se rappelle de plusieurs cas d’alignement de la loi fiscale sur la loi comptable. Il s’avère donc judicieux d’aligner les dispositions de la loi fiscale sur celles de la loi bancaire et autres instruments réglementant le secteur.