Résolument, les partis politiques ont juré de nous en faire voir de toutes les couleurs. Et autant dire que la semaine écoulée a été particulièrement intense. En tête d’affiche, on retrouve deux partis de la majorité, le PJD et le RNI, qui se livrent à un crêpage de chignon. On aurait trouvé ça drôle voire marrant, si la conjoncture aussi bien économique que sociale n’était dans le rouge.
Si c’est l’ambiance qui règne actuellement au sein de la majorité, on voit mal comment elle peut remplir les rôles qui sont les siens ? Quelle cohérence faut-il accorder à la coalition gouvernementale actuelle ? Sans oublier que les relations sont également tendues entre le PJD et le PPS, autre parti de la majorité. Mais quelle ambiance !
Et ce n’est pas fini, le PAM qui menaçait de déposer une motion de censure, il y a quelques semaines contre l’actuel gouvernement avant de se tapir dans le silence, vient de se fendre d’un communiqué au vitriol contre les deux partis mentionnés plus haut. Le PAM, dont le bureau politique se réunissait le 25 septembre, a tiré sur tout ce qui bouge. Pourtant, à la lumière de la Constitution et vu le nombre de sièges dont il dispose, rien ne l’empêche d’agir de l’opposition pour acculer la majorité a accélérer la cadence de son travail.
Puis, il y a l’USFP. Tiens, on l’avait oublié celui-là ! Il a tenu son conseil national le 29 septembre et bien sûr, il se dit inquiet de la tournure des événements au sein de la majorité, de la mauvaise gestion de la question de l’emploi des jeunes et déplore même qu’on ait ignoré ses propositions… Mais ne serait-ce que pour l’histoire de ce grand parti que fût l’USFP, réagissez autrement. Quittez ce navire, d’ailleurs même votre présence au sein de cette majorité est l’une des plus grandes anomalies aussi bien politiques qu’idéologiques que nous avons vécues sur la scène politique.
On vous épargne notre commentaire de voir Mohand Laenser rempiler pour un nouveau (sic) mandat à la tête du MP, bonjour le renouveau !
Alors, nous ne cachons pas plus longtemps derrière notre petit doigt : La classe politique n’est vraiment pas au rendez-vous des attentes des Marocains, de plus en plus déboutés !
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La mise à niveau des Partis Politiques :
Une affaire de toute la Nation
Pour assurer sa prospérité, une nation se doit de confier la conduite de ses affaires aux meilleurs parmi ses membres. Et pour ce faire, elle ne peut s’appuyer que sur le moins mauvais des systèmes que l’humanité ait inventé, à savoir la démocratie ; qui est devenue, dès lors, l’objectif à atteindre pour tous ceux qui aspirent à une meilleure gouvernance des affaires publiques. Or, le moteur de la démocratie n’est autre que les Partis politiques qui, pour alimenter le pays par le meilleur de ce qu’ils comptent comme compétences, doivent eux mêmes s’appuyer sur la démocratie.
La question qui se pose alors : les partis politiques marocains ont-ils tous une gouvernance et un fonctionnement démocratiques ? Les éléments de réponse à cette question se trouvent, d’une part, dans la contestation quasi systématique des élections dans presque tous les Partis Politiques ; et d’autre part, dans l’indigence du débat politique et la médiocrité patente de bon nombre de nos dirigeants politiques; ce que corroborent, par ailleurs, les appels réitérés du Souverain pour élever le niveau du débat politique, dont le dernier en date fut au cœur du discours royal au Parlement le 9 octobre 2015.
La deuxième question qui se pose alors : pourquoi nos partis politiques souffrent-ils dans leur majorité d’un déficit démocratique ? Nul besoin d’être fin observateur pour répondre à cette question tant les raisons sont nombreuses et évidentes; la principale étant, à notre humble avis, la perte de ce que le philosophe des lumières, Montesquieu, considérait comme l’un des trois fondements de la démocratie, à savoir : la vertu politique, les deux autres fondements étant la justice et la liberté. Cette vertu politique qui consiste en « l’amour des lois et de la Patrie », et qui exige « une préférence continuelle de l’intérêt public au sien propre ».
En l’absence de vertu politique, la course pour les positions et les avantages devient l’objectif principal à tous les niveaux et l’on ne s’émeut plus devant la quasi inexistence de débat démocratique et public sur les programmes et visions des uns et des autres.
Ainsi, à l’approche des congrès s’ouvre, dans quasiment tous les partis, une guerre de positions où les principes et valeurs sont mis de côté et où tous les coups sont permis. Une guerre exténuante dont le parti sort, le plus souvent, divisé et affaibli. D’une part, en perdant une partie de ses militants, les déçus de la course bien entendu, mais aussi les plus sincères qui, ne s’y retrouvant plus, préfèrent prendre leurs distances; et d’autre part, en se retrouvant sous les tirs nourris du camp des « perdants », ce qui réduit le rendement du parti, en écorne l’image et contribue au discrédit de la politique en général. Le résultat est une dilapidation de ce capital immatériel que constituent les partis politiques, si essentiel à la bonne marche des institutions et à la stabilité du pays.
La troisième question qui se pose enfin : que faire alors pour rendre nos acteurs politiques plus vertueux et partant faire accéder nos partis politiques à une normalité démocratique ? La vertu et les valeurs qui la sous-tendent se cultivant dans la durée et ne deviennent dominantes dans une Société ou dans un Parti Politique qu’au terme d’un long processus de maturation pouvant prendre des générations ; le Maroc qui a tant de retards à rattraper, ne peut, à l’évidence, se permettre d’attendre des générations pour voir ses Partis Politiques se mettre au diapason.
L’objectif prioritaire devient alors de trouver les voies et moyens d’augmenter rapidement et efficacement le niveau de vertu de nos acteurs politiques. Sans minimiser l’importance des dynamiques internes de démocratisation que nombre de militants s’évertuent à créer au sein de leurs partis; il n’en demeure pas moins que seule la loi est à même de permettre d’atteindre plus rapidement l’objectif visé.
Au vu du piètre état dans lequel se trouve le paysage politique marocain, la dernière question qui se pose : pourquoi la loi 36-04 du 14 février 2006 relative aux partis politiques n’a-t-elle pas permis d’atteindre les très ambitieux objectifs qu’énonçait son propre préambule ?
La raison principale réside, à notre humble avis, dans l’absence dans la loi d’un dispositif efficace organisant et encadrant la diversité et la pluralité dans nos partis politiques, le débat démocratique et surtout les élections qui sont, souvent, à milles lieues de respecter les conditions minimales garantissant l’égalité des chances et une compétition loyale entre les candidats ; si bien que, paradoxalement, les conditions d’accès à un mandat électif dans une toute petite commune sont devenues autrement plus rigoureuses que dans un parti politique !
Cela étant, il devient, à nos yeux, plus que nécessaire de procéder à une profonde réforme de la loi 36-04 pour en combler les très nombreuses et béantes brèches et mettre, ainsi, fin à l’entropie démocratique qui empêche nos partis d’être ce qu’ils devaient toujours être : de véritables écoles de la démocratie et des espaces d’expression du génie marocain.
Parce qu’elle est aussi importante que celle de la Constitution, la réforme à mener gagnerait à associer toutes les forces vives du pays dans le cadre d’une commission nationale ad hoc, car il s’agit là d’une question qui conditionne l’avenir du pays et qui en fait, par conséquent, une affaire de la Nation, toute la Nation, et pas uniquement des partis politiques.
Un article de M’hammed GRINE – 2016.