Ecrit par Lamiae Boumahrou |
Après un blocus qui dure depuis plus de 13 mois en raison de la fermeture des frontières et de l’absence des touristes, les opérateurs du secteur des bureaux de change ne sont pas au bout de leur surprise. Après des mois d’attente pour l’élargissement de leur champ d’intervention pour une reprise d’activité, l’Office des changes vient de leur annoncer que la décision ne relevait pas leur sort mais de Bank Al-Maghrib. Décryptage.
Le 5 mars dernier, la Fédération Nationale des associations régionales des bureaux de change (FNAR) a mené une grève nationale pour dénoncer une situation d’agonie de tout le secteur.
Un secteur en arrêt d’activité depuis plus d’un an en raison de la fermeture des frontières et de l’arrêt de toute activité touristique. Et la situation ne va pas se débloquer de sitôt vu la situation épidémiologique à travers le monde.
Et pourtant, comme déjà soulevé par EcoActu.ma, ce secteur n’a pas été concerné par les mesures de soutien et d’accompagnement accordées par l’Etat aux secteurs touchés par la crise sanitaire ni soutenu pour trouver une alternative temporaire au blocage.
Et pourtant, les opérateurs n’avaient demandé à leur instance de tutelle, à savoir l’Office des changes, qu’une certaine souplesse pour compenser les pertes essuyées par le secteur qui se chiffrent en millions de DH à travers la révision du cahier des charges régissant l’activité de change manuel notamment la disposition obligeant les bureaux de change à avoir comme objet unique au niveau de leur statut « le change manuel ».
L’Office s’était engagé en juillet 2020 à répondre à cette revendication à condition de conclure des partenariats entre les bureaux de change et les établissements de paiement qui sont à la base des concurrents. Une promesse qui n’a pas été tenue puisque 6 mois plus tard (plus précisément le 8 février 2021) l’Office a informé la Fédération qu’il « est prédisposé pour le traitement des demandes de conversion de l’agrément catégorie « A » délivré aux bureaux de change requérants, en catégorie « C » délivré aux agences mandataires des établissements de paiement et ce sur la base, d’un contrat de mandat à conclure individuellement par chaque bureau de change avec un établissement de paiement dûment agréé par Bank Al Maghrib ».
En d’autres termes l’Office a proposé aux bureaux de change le retrait de la catégorie A, qui est un acquis de plus de 13 ans pour le secteur lui accordant une autonomie financière et de gestion. Une proposition rejetée en bloc par le secteur qui continue de se battre à contre-courant pour faire entendre sa voix.
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Nous avons appris qu’une réunion s’est tenue ce mardi 6 avril entre la Fédération et l’Office des changes pour tenter de débloquer la situation et de trouver une issue au blocage qui va causer la mort imminente de tout secteur.
« Cette réunion intervient après la grève nationale menée par la Fédération pour dénoncer la solution proposée par l’Office pour sortir le secteur de cette impasse. Nous sommes catégoriques nous n’accepterons jamais de nous convertir de la catégorie A à C. Nous avons réitéré notre revendication d’élargir notre champs d’intervention de façon temporaire afin que nous puissions reprendre notre activité et éviter la faillite de centaines de bureaux de change », nous a affirmés Abdeslam El Yamlah, président de la FNAR.
Malheureusement, la Fédération a été surprise d’apprendre lors de cette réunion, après 13 mois de pandémie, que cette décision ne relevait pas du ressort de l’Office des changes mais plutôt de Bank Al Maghrib.
« On nous a orienté vers Bank Al-Maghrib pour lui soumettre notre doléance alors que c’est l’Office des changes en sa qualité d’administration de tutelle du secteur et c’est à lui de défendre le dossier auprès de BAM. Une réponse que nous considérons d’irresponsable de la part de l’Office », précise Abdeslam El Yamlah.
L’Office a donc lancé la balle à la Banque centrale qui serait à l’origine du blocage. Abdeslam El Yamlah affirme que la Fédération a déjà interpellé BAM sur la question sans jamais recevoir de réponse.
« Malheureusement il y a un fort lobby des établissements de paiement exercé par leur association professionnelle et qui fait le veto pour nous pousser à nous soumettre à eux (nos concurrents) et finir par disparaitre », déplore Abdeslam El Yamlah.
Rappelons que l’Office avait proposé la conversion totale de l’agrément initial en catégorie « C » relative aux agents mandataires des établissements de paiement. Ce qui équivaut en somme à l’abandon de la proposition de base d’une convention de partenariat avec un tel organisme et donc la perte totale du statut des bureaux de change en tant que société de change autonome.
L’Office a proposé, des mesurettes insignifiantes, comme précisé par le président de la Fédération, notamment l’accord du service du paiement et retrait par TPE. Une doléance du secteur de plus de 13 ans mais qui ne va servir à rien en l’absence de touristes.
Le Fédération porte également la responsabilité de ce que traverse le secteur au ministère des Finances qui devait prévoir des mesures d’accompagnement à un secteur en arrêt total d’activité. En attendant une solution, c’est le statu quo.