COVID-19 a frappé de plein fouet l’économie nationale. Le secteur public s’investit généreusement, pour mettre du baume au cœur de cette économie. Seulement il est plus facile d’être généreux que de ne pas le regretter.
A quoi sert donc l’épargne ?
Dès l’annonce de l’état d’urgence sanitaire, l’État a sorti l’artillerie lourde pou venir à la rescousse des entreprises et des ménages. Il n’a même pas donné le ton à ses agents économiques pour qu’ils développent des anticorps face à la crise occasionnée par le Covid-19. Il devrait laisser comme dans un régime la crise puiser dans la graisse et ne prévoir d’intervention directe que lorsque le mal atteigne les muscles.
Et pour cause, selon les chiffres du HCP au titre de l’année 2018, les sociétés financières et non financières et les ménages contribuent respectivement pour 55,3% et 27,7% à l’épargne nationale. Les réserves sont donc là et devraient servir de bouclier contre les attaques économiques du Covid-19. La manière dont nos entreprises et nos ménages se sont agenouillés devant la crise et dans un temps défiant tout record, nous laisse perplexes et nous pousse à questionner notre tissu économique. S’agit-il d’une crise réelle ou d’une mise en scène bien orchestrée ?
Une vraie caravane de solidarité
Dès la création du Fonds de lutte contre le Covid-19, les pouvoirs publics ont donné le la en y drainant la bagatelle de 10 Mds de DH. Après cet acte, plusieurs Établissements et Entreprises publiques se suivent à la queue leu leu pour apporter leur soutien financier. Ainsi l’OCP a ouvert le bal avec 3 Mds de DH suivi du Fonds Hassan II avec 1,5 Md de DH, la CDG avec 1 Md de DH, l’ANCFCC avec 1 Md de DH… et la liste est loin d’être bouclée.
En effet, le portefeuille des EEP comprend, selon le rapport publié avec la Loi de Finances 2020, 225 établissements publics à participation directe du Trésor. Ces mêmes EEP détiennent 479 filiales. Bon nombre de ces entités, notamment celles évoluant dans les secteurs marchands seront invitées à prêter main forte à ce Fonds en y versant des espèces sonnantes et trébuchantes. Notre surprise de voir ces administrations publiques, qui ne contribuent à l’épargne nationale qu’ à concurrence de 17%, représenter le soutènement essentiel de notre économie, n’est égalée que par la fierté d’avoir un tel empire aussi solide géré avec une main de fer.
Et le budget général
Seulement jusqu’à quel point peut tenir ce secteur à force de puiser dans ses réserves. En effet, ces mêmes établissements sont engagés sur d’autres fronts. Sur les recettes ordinaires de l’État prévues en 2020 et chiffrées à 257 Mds de DH, ces mêmes EEP doivent contribuer pour l’équivalent de 12 Mds de DH. L’essentiel de cet apport doit provenir des produits des monopoles, parts de bénéfices et contributions des établissements pour 4 Mds de DH, des dividendes à provenir de sociétés à participations publiques pour 4 Mds de DH et de dividendes à provenir d’autres sociétés pour 1,5 Md de DH.
Si les dividendes semblent ne pas être affectés par la crise dans la mesure où ils correspondent à des affectations de résultats réalisés avant l’avènement de la crise, les autres recettes seront fortement affectées car dans leur majorité sont corrélées avec l’activité économique. En effet, les recettes de ces établissements sont générés par des taxes parafiscales. Ces dernières sont attachées à titre indicatif aux opérations de commerce extérieur, aux opérations de change, aux opérations immobilières, aux opérations d’assurance…Et donc par effet d’éviction, le budget risque de perdre potentiellement des montants conséquents.
La mouche à miel peut aussi piquer
L’économie nationale ne doit donc pas faire son miel de la générosité du secteur public. Le partage des effets de la crise doit faire l’objet d’un vrai partenariat public-privé. Dans ce cadre, il n’est pas question d’abuser de la bonté de l’argent public notamment en en bénéficiant indûment et donc frauduleusement. L’État doit mettre en place des processus de contrôle afin de sécuriser les deniers publics et éviter leur dilapidation. La période actuelle ne manquera sûrement pas d’opportunistes et d’individualistes avides d’argent qui n’hésiteront pas de tirer profit de la panique et de l’incertitude.