Le développement économique d’un pays est mesuré, entre autres, par le taux d’employabilité et de chômage. Au Maroc, l’emploi est sans doute le nerf de guerre de la croissance qui peine à décoller. Parmi les moults fronts de bataille, le secteur industriel qui constitue un moteur de relais pour booster l’économie et créer de l’emploi. Le Plan d’accélération industriel, que beaucoup avaient jugé de trop ambitieux, a fixé comme objectif de créer 500.000 emplois à l’horizon 2020. Pari presque relevé puisque à une année de l’échéance, le PAI est à plus de 80% des objectifs réalisés soit 400.000 emplois déjà créés. La conférence TED organisée ce jeudi 3 octobre par l’Association nationale des gestionnaires et formateurs des ressources humaines (AGEF) avec l’Association MBA Ponts Alumni et la Fondation Konrad Adenauer Stiftung a été l’occasion de revenir sur le chemin parcouru et celui qui reste à faire dans ce domaine.
Une rencontre destinée à une composante importante de l’entreprise à savoir les ressources humaines. D’où le choix de la thématique de cette rencontre : « Le Plan d’accélération industrielle 2014-2020 et rôle des Ressources humaines dans la réussite des écosystèmes industriels ». Et qui mieux pour parler de cette composante que le porteur du Plan d’Accélération industrielle 2014-2020, Moulay Hafid Elalamy, ministre de l’Industrie, du Commerce, de l’Investissement et de l’Economie numérique.
Comme il sait bien le faire, le ministre a fait un diagnostic exhaustif de l’employabilité dans le secteur industriel mais aussi du rôle des RH dans la réussite de la politique industrielle.
Certes les chiffres sont bons puisque l’objectif des 500.000 emplois sera atteint d’ici fin 2019, soit une année avant la date prévue. Toutefois, les défis à relever sont encore nombreux. Au Maroc ce ne sont pas les compétences qui manquent mais les canaux qui doivent les valoriser.
Le ministre a soulevé un point important qu’est celui de l’incapacité des départements des RH à définir les besoins et les profils des ressources humaines nécessaires à l’entreprise.
Un manque de visibilité qui n’est pas sans conséquence sur la formation des profils mis sur le marché ; ce qui explique, en quelque sorte, l’inadéquation entre l’offre et la demande et crée un décalage entre les besoins des entreprises et le marché de l’emploi.
Le ministre a reproché aux DRH ce manque de projections, qui n’est pas spécifique uniquement au Maroc, a-t-il tenu à rassurer, mais qui se répercute sur les politiques publiques en matière d’emplois. Des politiques qui peinent à adapter les besoins pour in fine mettre sur le marché des « chômeurs confirmés », faute de data.
Aujourd’hui, le ministère déplore un manque d’implication des DRH notamment en termes de remontée d’informations relatives à une composante essentielle de la chaîne de valeur, à savoir les RH. « Nous avons approché les entreprises (marocaines et étrangères) pour identifier leurs besoins en RH pour les 5 prochaines années. On s’est aperçu qu’aucune entreprise ne disposait d’un plan de ressources humaines », a regretté le ministre.
Et pourtant, les directions des RH constituent l’un des canaux les plus importants d’employabilité des personnes.
Moulay Hafid Elalamy qui s’est amusé à mettre et remettre ses anciennes casquettes (Président de la CGEM, Président de Saham…) a également fait une autocritique en affirmant que lui-même, homme d’affaires avisé qu’il est, avait omis cette composante essentielle dans son mode de gestion.
Ce n’est qu’une fois ministre, qu’il s’est rendu compte que sans une projection sur les besoins en ressources humaines, il est difficile de mettre en œuvre des projections et des stratégies sectorielles notamment dans l’industrie. Un secteur où les enjeux de croissance et d’investissement sont énormes. Le ministre a rappelé l’attractivité du Maroc vis-à-vis des investisseurs étrangers qui requiert une main-d’œuvre qualifiée capable de répondre aux besoins immédiats et évolutifs des industriels.
C’est pourquoi MHE insiste sur la nécessité de bien identifier le besoin car comme il a souligné « Quand la commande est nulle, le résultat est dramatique ».
L’exemple de la réussite des instituts de Formation aux Métiers de l’Industrie Automobile (IFMIA) est très parlant dans la mesure où le taux d’insertion et d’intégration des étudiants a atteint 96%. « Du jamais vu », d’après les dires du ministre.
C’est dire l’importance de cet indicateur dans l’émergence industrielle du pays qui passera forcément par l’implication des professionnels dans le processus de formation ne serait-ce que par l’orientation des besoins.
De fait, la tâche des DRH ne se limite donc pas uniquement à l’acte du recrutement mais dans tout le processus de formation des futurs employés en identifiant les besoins exprimés.
Ça fera gagner au Maroc des années de développement que nous perdons bêtement. Aujourd’hui, face à un monde qui évolue de façon rapide notamment avec les nouvelles technologies, tous les maillons de la chaîne industrielle sont tenus de se retrousser les manches et d’agir maintenant.