Les tensions diplomatiques entre le Mali et la Côte d’Ivoire ne sont pas tombées, cela peut être expliqué par la dernière crise entre les deux pays, sachant que le 12 juillet dernier, la Côte d’Ivoire a demandé au Mali la libération sans délai de ses 49 militaires arrêtés dimanche 10 juillet à l’aéroport de Bamako et accusés d’être des « mercenaires ».
Mais la question qui se pose : pourquoi ce nombre important de militaires ivoiriens ont-ils voyagé au Mali ? N’y a-t-il pas une intention d’espionnage?
Tout d’abord, il faut rappeler que la Côte d’Ivoire voulait toujours profiter des crises politiques internes du Mali, à titre d’exemple, à la mutinerie déclenchée au sein de l’armée malienne, le mois d’août 2020, la Côte d’Ivoire a décidé de la fermeture de ses frontières terrestres et aériennes avec le Mali à compter du mardi 18 août et ce, jusqu’à nouvel ordre.
Cette décision est consécutive à la décision de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) de la fermeture de toutes ses frontières terrestres, maritimes et aériennes de ses pays membres avec ce pays.
Sans oublier que la Côte d’Ivoire est un allié historique de la France en Afrique et les liens entre les deux pays sont forts. Tandis que, les relations du gouvernement malien avec la France et l’Union européenne sont tendues, car les autorités maliennes avaient annoncé, le 15 mai 2022, le retrait du pays de tous les organes et instances du G5 Sahel, y compris la force conjointe.
Ce retrait intervient après l’annonce, par le nouveau pouvoir de la suspension d’un traité de coopération signé en 2014 avec la France, ainsi que des accords de 2013 et 2020 fixant le cadre juridique de la présence de la force anti-djihadiste Barkhane et du regroupement de forces spéciales européennes Takuba.
Alors, faut-il penser que la France serait à la manœuvre de ce qui se passe entre la Côte d’Ivoire et le Mali, et même aussi entre la Mali et la CEDEAO ?
En cause, la mise en place des sanctions décidées le 9 janvier 2022 par la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et soutenues par la France : la fermeture des frontières terrestres et aériennes avec le Mali ; la suspension de toute transaction commerciale, à l’exception de certains produits de première nécessité ; et le gel des avoirs du Mali à la Banque centrale des États d’Afrique de l’Ouest (BCEAO) et dans les banques commerciales de la région.
A l’évidence, ces sanctions, considérées illégales par le gouvernement malien, visaient non seulement à isoler le pays sur la scène internationale en fragilisant son économie, mais aussi le déstabiliser, en créant une sorte de pression des populations sur les dirigeants du Mali.
La CEDEAO et les autres partenaires comme la France et l’Union Européenne sont ingérés dans les affaires internes du pays, surtout que les autorités maliennes ont une vision de la transition qui est en contradiction avec leur conception.
Le Président de la transition, le Colonel Assimi Goïta, invoque le temps et l’autorité indispensables pour relever les immenses défis auxquels fait face le pays pour ne pas commettre à nouveau les erreurs d’un passé tourmenté.
Mais les autres, estiment que la transition devrait s’atteler à organiser rapidement les élections pour pouvoir élire un président qui leur convient.
En effet, le Mali, à la fois pour sa position stratégique mais aussi pour ses richesses minières, attire de nombreux autres pays. C’est un grand pays aux enjeux de géopolitique, de géostratégie. D’où, l’importance de transformer ces opportunités en renforçant ses relations avec certains pays d’Afrique, comme la Guinée et la Mauritanie, et d’autres pays de l’Asie et l’Europe de l’Est, afin de de sortir de cette situation.
Sans oublier que les sanctions n’ont que réveillé un sentiment patriotique au sein de l’opinion malienne, ce qui permettra au pouvoir de transition de profiter d’une position plus forte.
Par Khalid Cherkaoui Semmouni,
Professeur de droit constitutionnel à la Faculté de droit à Rabat