Le Maroc a plutôt bien riposté à la Covid-19 selon le FMI. Mais le choc a été tel que les marges de manœuvre ont été réduites comme peau de chagrin. La priorité pour le pays est de recharger ses munitions surtout en ces temps de grandes incertitudes. Détails
Une visio conférence s’est tenue ce 5 janvier 2021 sur la consultation effectuée par le Fonds monétaire international (FMI) au titre de l’article IV de ses statuts avec le Maroc. L’occasion de passer en revue les conclusions et recommandations majeures à l’issue de la réunion du 18 décembre du Conseil d’administration du FMI.
A commencer par les priorités macroéconomiques pour le Royaume après 9 mois de riposte à la pandémie de la Covid-19.
Roberto Cardarelli, chef de la mission menée au Maroc du 19 octobre au 2 novembre 2020, identifie dans ce sens au moins deux priorités majeures. La première est de rétablir la marge de manœuvre dont disposait le Maroc avant la Covid-19 et qui a été épuisée dans la riposte aux effets économiques, financiers et sociaux de la pandémie. Dans ce sillage et en tant que priorité identifiée par le FMI, la réduction graduelle de la dette publique tout en soutenant la reprise.
De son propre aveu, Roberto Cardarelli estime qu’il s’agit d’un équilibre très difficile à atteindre, de surcroît dans le contexte actuel. Toujours est-il que dès que la reprise se confirme, les autorités marocaines devraient s’atteler sur la question de résorption graduelle du déficit budgétaire. Car un niveau de dette élevé contribue à la vulnérabilité du Maroc face à un choc à venir.
Mais dans l’ensemble, le niveau de la dette publique est jugé soutenable d’autant que la dernière émission du Trésor à l’international s’est faite dans des conditions jugées très favorables comparativement à d’autres pays émergents. De même les avoirs officiels de réserve dépassent les 300 Mds de DH couvrant 7 mois d’exportation.
Cette situation est confortée par la décision du Maroc de procéder au remboursement par anticipation au FMI d’un montant de 651 millions de DTS (Droits de Tirage Spéciaux), soit l’équivalent de près de 936 millions de dollars américains ou 8,4 milliards de dirhams, sur les trois milliards de dollars de la LPL.
Le chef de la mission du FMI a dans ce sens rappelé que le tirage de la LPL en avril a permis d’absorber le premier choc Covid et qu’au vu de la situation de financement extérieur du Maroc jugée confortable, il n’y pas de discussions entre le FMI et le Maroc pour une nouvelle LPL.
Bien évidemment, le FMI reste attentif à l’évolution économique du Maroc, la nature et le rythme de reprise ainsi que tout autre choc externe qui pourrait survenir dans un contexte mondial empreint d’incertitudes, auquel cas le Fonds met à la disposition du Maroc ses outils d’aide, dont la LPL entre autres. Mais le chef de la mission insiste qu’il n’y a à ce jour aucune discussion dans ce sens d’autant que le contexte ne s’y prête pas.
Politique monétaire et de change, BAM scrutée
Maximilien Queyranne, senior economist au FMI soutient que la Covid-19 a provoqué un tel choc macroéconomique qu’il a impacté le secteur financier, mais que le secteur bancaire marocain a fait montre d’une bonne résilience. Grâce notamment aux mesures édictées par BAM pour soutenir le crédit et le financement de l’économie.
Il souligne par ailleurs que les banques marocaines ont augmenté le niveau de provisionnement en perspective de la hausse des défaillances. Donc, le risque de transmission d’une crise économique vers le secteur financier semble écarté par le FMI en l’état actuel des choses.
Il va sans dire que BAM a pris des mesures exceptionnelles face à une situation qui l’est tout autant. Mais peut-elle mieux faire et lâcher du lest pour soutenir la reprise.
Pour Roberto Cardarelli, la décision revient à BAM qui a baissé le taux directeur à un niveau historique jugeant que cette politique monétaire accommodante nécessaire et utile dans le contexte actuel, et peut-être bien que la banque centrale préfère garder une marge de manœuvre s’il s’avère encore nécessaire de baisser davantage le taux directeur. D’autant que le taux d’inflation demeure très faible. Une baisse du taux directeur n’est pas à écarter en cas de besoin et selon l’évolution de la situation économique en 2021.
Pour autant, le chef de la mission du FMI estime que la situation actuelle pourrait être favorable à la poursuite de l’assouplissement du taux de change, d’autant que l’élargissement de la bande de fluctuation opéré en mars 2020 a pu absorber le 1er choc Covid.
A côté, les autorités marocaines préfèrent y aller graduellement et en s’entourant des précautions nécessaires.
Le FMI a par ailleurs soulevé la nécessité pour le Maroc d’accélérer le train des réformes, notamment fiscale mais également de lutte contre la corruption ou encore celle de l’administration publique, entre autres.