Les finances publiques au Maroc subissent une double pression. Certains s’acharnent sur les recettes pour les limer, d’autres plaident pour l’augmentation des dépenses sous prétexte de l’importance des besoins. Le déficit budgétaire est inéluctable et son financement entraîne un effet boomerang.
Réveillez-vous semble dire le trésor public aux prétendants au réaménagement du régime fiscal marocain lors des récentes assises de la fiscalité, en publiant son bulletin du mois d’Avril 2019. Il a l’air de ne pas vouloir laisser le public savourer les premières réussites déclinées dans les engagements de l’Argentier du pays. Le bulletin de la Trésorerie Générale nous a pris à la hussarde sans nous laisser méditer la note positive affichée par le dernier rapport d’activité de la Direction Générale des impôts au titre de l’année 2018.
Les finances publiques des chiffres accablants
Loin des lettres, proche des chiffres, au terme du mois d’Avril 2019, les recettes ordinaires se sont élevées à 80,627 Mds de DH, les dépenses ordinaires à 81,729 Mds de DH et les dépenses d’investissement à 24,662 Mds de DH. Le Trésor public a dû faire appel au marché pour demander assistance à hauteur de 19,237 MMD.
Le Maroc vit au dessus de ses moyens.
Les doléances des assises fiscales : un espoir trompeur
impôt sur les société
Pour ceux qui réclament la réduction de l’impôt sur les sociétés et l’annulation de la cotisation minimale, les chiffres doivent les raisonner. En effet, la recette dégagée par cet impôt s’est établit à 15,765 MMDH et représente 21% des recettes fiscales. Toute action à la baisse, sans mesure accompagnatrice se traduisant par l’extension de l’assiette ou de mesures favorisant la prospérité économique, serait désastreuse pour les finances publiques.
Impôt sur le revenu
Ceux qui sont en quête d’une révision de l’impôt sur le revenu pour donner un coup de fouet à la consommation et animer le marché intérieur, leur souhait semble difficile à exhausser. Et pour cause, il s’agit d’une recette qui occupe une place prestigieuse parmi les recettes de l’Etat. L’impôt général génère un aliment de 16,636 Mds de DH, soit 22% des recettes fiscales. Il dépasse ainsi la recette permise par l’impôt sur les sociétés. A croire, le rapport d’activité de la DGI au titre de l’exercice 2018, l’essence de cet impôt est d’origine salariale. Karl Marx a raison. La source de la valeur et donc de la richesse.
La taxe sur la valeur ajoutée
Les adeptes de la révision de la taxe sur la valeur ajoutée en implorant le législateur pour le réaménagement des taux, l’extinction du butoir et la consolidation du principe de la neutralité, doivent poireauter. La taxe a généré au terme des quatre premiers mois de l’année 2018, une recette de l’ordre de 21,620 MMD, soit 28,50% des recettes fiscales. Cette taxe qualifiée tant de non sociale tantôt de non cohérente, permet et jusqu’à preuve du contraire de contribuer sensiblement dans la couverture des dépenses de l’Etat.
Dépenser sa salive dans la revue à la baisse des impôts s’avère une croisade vaine. Et pour cause les recettes propres sont incapables de couvrir les dépenses de fonctionnement et les dépenses d’investissement de l’Etat. Si les premières se sont établies à la fin du mois d’Avril 2019 à 81,729 Mds de DH, les secondes se sont fixées à 24,662 Mds de DH. On note avec un grand regret l’importance des dépenses de fonctionnement par rapport à celles associées à l’investissement. Pis encore, le montant engagé en termes d’investissement, secrète et ce pour des raisons de nomenclatures budgétaire, des dépenses de fonctionnement. Il ne s’agit donc pas d’un pur investissement. Les dépenses de fonctionnement sont constituées des dépenses en biens et sévices à hauteur de 60,874 Mds de DH, des intérêts de la dette pour 10,934 Mds de DH, la compensation à concurrence de 6,751 Mds de DH et les remboursements dégrèvements et restitutions fiscaux pour un montant de 3,251 Mds de DH.
Le déficit monétaire et politique
Le déficit, devenu chronique, du trésor s’établit à fin Avril 2019 à 14,112 Mds de DH. Un déficit qui s’est creusé de manière spectaculaire par rapport à Mars 2019. Quel gâchis ! le déséquilibre budgétaire est devenu la norme. Pour parer cette situation, le recours à l’endettement devient incontournable. Le service de la dette aussi bien intérieure qu’extérieure a impacté le budget de l’Etat à hauteur de 10,943 Mds de DH.
Si le bulletin, pour ne pas troubler les âmes sensibles, passe sous silence le montant de l’encours de la dette extérieure, il traire avec une générosité exemplaire tous les aspects de la dette intérieure. L’encours de cette dernière se chiffre à la fin du mois d’avril 2019 à 558 Mds de DH et a produit au profit des usuriers des intérêts de l’ordre de 5,037 Mds de DH. Et on se demande où va la liquidité et pourquoi les banques ne prêtent pas aux PME et PMI et à l’économie en général. Les interventions récurrentes de l’Etat sur le marché financier épongent la liquidité et privent les entreprises d’une source de financement. En matière de crédit, l’Etat solvable séduit plus les banques qui haïssent la prise de risques.
Au niveau des dépenses, on a tout essayé pour les compresser : départ volontaire, libéralisation des prix, reforme de la retraite….mais hélas la mayonnaise ne prend pas.
Le sommet réclame la baisse des impôts, la base avide des dépenses : pitié pour notre cher pays.