Pour Moulay Hafid Elalamy, le ministre de l’Industrie, secteur qui attire le plus d’investisseurs au Maroc, l’année se soldera probablement avec de meilleurs résultats que 2017. Il revient sur le concept d’écosystème et rappelle le rôle majeur des investisseurs envers leurs régions.
EcoActu.ma : Vous avez tenu le 23 octobre la deuxième commission d’investissement en 2018. Une appréciation de la moisson de cette année ?
Moulay Hafid Elalamy : Nous avons tenu aujourd’hui une commission d’investissement présidée par le Chef de gouvernement qui a approuvé 20 projets de 25 Mds DH d’investissement. Avec la commission tenue le 10 janvier et celle-là, nous avons dépassé les 57 milliards de DH approuvés en 2018 ce qui en fait une année exceptionnelle et encore, elle n’est pas finie. En effet, nous avons l’intention de tenir une troisième commission d’investissement avant la fin de l’année et probablement avoir des résultats meilleurs que l’année dernière qui était exceptionnelle.
EcoActu.ma : On constate que les investissements marocains sont à hauteur de 63% et si l’on exclut les GIV, nous sommes à 7% d’IDE sur l’ensemble des investissements. Faut-il en conclure que la tendance baissière des IDE se poursuit ou que la demande sur les métiers mondiaux a atteint sa maturité ?
Moulay Hafid Elalamy : Non, il faut savoir que nous sommes sur des chiffres plus positifs. Dans l’ensemble, il faut intégrer tous les projets qui sont en cours. C’est vraiment compliqué de comparer sur une année puisqu’il y a des décalages qui se font sur certains investissements.
Les IDE, il faut les analyser avec intelligence et ce n’est pas évident. Vous avez une année où vous recevez un projet aussi important et exceptionnel que celui de PSA, l’année d’après il semblerait que les IDE ont baissé. Non. En statistiques, on appelle ça l’écrêtement des exceptions. Le Maroc est un pays qui attire toujours les IDE et vous le verrez d’ici la fin de l’année.
Les investisseurs étrangers benchmarkent des pays pour bien choisir dans lequel s’installer et cette décision d’investissement n’est pas permanente. Je prends par exemple le textile, l’industrie automobile ou dans l’industrie lourde, vous ne pouvez pas réaliser des Maghreb Steel tous les jours. Les IDE, il faut les intégrer d’abord avec la conjoncture mondiale, ensuite il faut les intégrer avec ce que vous avez eu d’année en année. Aujourd’hui, le Maroc, sur la partie des investissements globalement se porte bien par rapport au reste de la région. Nous sommes encore premiers en IDE sur le continent, nous attirons le plus et cela nous est un peu reproché par nos concurrents. Et encore, nous n’avons pas encore bouclé l’année 2018.
EcoActu.ma : Sentez-vous que les projets approuvés dans le secteur de l’industrie qui est sous votre tutelle, commencent à adhérer à l’idée d’écosystème et s’y inscrivent ?
Moulay Hafid Elalamy : Globalement, les écosystèmes ne sont rien d’autre qu’une autre façon de structurer l’industrie marocaine. Au lieu d’avoir une industrie en silo, nous avons opté pour une industrie qui se développe en un ensemble complémentaire. Cette démarche donne des résultats assez impressionnants. Autrefois, dès qu’un investisseur venait, on lui ouvrait les bras. La démarche actuelle est plus structurée et repose sur des choix ciblés pour composer un écosystème complet.
Parfois, nous allons même à la recherche des investisseurs qui nous intéressent pour compléter toute la chaîne de valeur. Aujourd’hui, si un investisseur veut s’installer au Maroc, il n’y a aucun problème mais il ne peut bénéficier de l’aide de l’Etat que s’il apporte une réelle valeur ajoutée à la stratégie et aux intérêts marocains.
EcoActu.ma : Il est vrai qu’en 2018, la région locomotive qu’est Casablanca a été détrônée mais une région comme Fès-Meknès et malgré tout les efforts pour créer une zone qui dispose de toute l’infrastructure nécessaire n’attire d’epsilon des investissements approuvés en 2018. Globalement comment orientez-vous les investisseurs sur les autres régions ?
Moulay Hafid Elalamy : Ce n’est une simple affaire que d’orienter un investisseur vers une région donnée, parfois parce qu’il a besoin d’une infrastructure dédiée qui existe sur une région donnée ou parce qu’il a besoin d’être à proximité d’un port pour exporter. S’il a besoin d’un port et que vous lui dites « venez à Fès », c’est simple il quittera le Maroc. C’est dire que vous ne pouvez pas obliger un investisseur à aller vers une région, vous pouvez lui suggérer, l’accompagner…
Mais les résultats aujourd’hui sur les régions sont assez probants. On n’aurait pas eu PSA à Kénitra, cette région n’aurait pas eu le développement qu’elle a aujourd’hui. Donc, il y a de vrais changements qui s’opèrent sur le territoire graduellement…
EcoActu.ma : Donc il faut trouver un « champion » qui puisse attirer toute la chaîne de valeur…
Moulay Hafid Elalamy : Pas uniquement, pour reprendre le cas de Fès-Meknès, il y a des opérateurs locaux qui se sont retroussés les manches et qui sont entrés dans la boucle de production pour le secteur automobile et qui font aujourd’hui des choses exceptionnelles. D’autres opérateurs doivent suivre et faire la même chose : l’Etat a mis à la disposition de cette région d’importantes infrastructures et c’est à leur tour d’en profiter et faire profiter leur région.