Le PLF 2021, après examen par la commission des finances et du développement économique, a été sujet à moult amendements tendant à réduire les ressources publiques. En les approuvant, le gouvernement n’explique pas comment va-t-il procéder pour compenser le manque afin de maintenir les recettes fiscales à leur niveau initial.
Le PLF 2021, dès qu’il a poussé la porte du parlement, a été différé, entre deux portes, devant la commission des finances et du développement économique. A écouter les interventions des 43 membres de ladite commission, on s’attend à ce que le PLF 2021, soit bombardé par une pluie d’amendements. Des amendements qui devraient parvenir aussi bien des faux frères que des frères ennemis. Il s’est avéré que les interventions ne renfermaient qu’un ramassis de paroles qui ne visaient que passer la rampe.
Le PLF 2021 n’a eu droit qu’à 185 amendements dont 178 s’attaquaient au premier compartiment du budget. Un rendement faiblard, si on se réfère à l’armada des députés et aux partis politiques représentés dans l’Hémicycle. On a observé 0,47 amendement par parlementaire et 15,42 amendements par parti politique.
Le gouvernement, convaincu que, à tort et à raison, les recommandations de l’opposition ne font qu’ajouter une ombre au tableau et que ses cadeaux ne peuvent être qu’empoisonnés, cavalier, reste sourd aux conseils. A ses yeux, les amendements n’ont pas pour but de raboter le PLF, au bénéfice de la société, mais pour bypasser le projet gouvernemental.
Seulement, le gouvernement n’a pas balayé d’un revers de main, tous les amendements proposés. Il en a validé quelques uns malgré leurs défauts. A cheval donné on ne regarde pas la bride ! Au nombre de 49, les amendements approuvés se composent essentiellement de 34 qui ont un caractère fiscal et 10 ayant un trait douanier. Ces amendements devant se traduire par des baisses des recettes fiscales, n’ont à notre grande surprise, fait bougé ces dernières d’un iota. Elles sont toujours de l’ordre de 202 Mds DH et représentent 88,60% des recettes ordinaires du budget. L’absence, anormale, de corrélation entre les recettes fiscales et les mesures fiscales et douanières prévues dans le PLF 2021, nous ahuri à plus d’un titre.
Soit que l’élaboration du budget de l’Etat se vase en vase clos au gouvernement. En d’autres termes, le budget est élaboré après neutralisation de tout contact avec le monde extérieur. Soit que l’exécutif, lors de l’élaboration de son budget applique la formule : il faut dépasser le but pour l’atteindre. En d’autres termes les prévisions sont si surestimées qu’elles ne peuvent être secouées par les amendements des parlementaires.
Dans sa réponse, le ministre de l’économie, des finances et de la reforme de l’Administration n’explique pas comment il compte compenser les baisses éventuelles des recettes fiscales qu’occasionneraient les amendements pour pouvoir maintenir lesdites recettes fiscales au niveau du PLF dans son état primitif. Sa réponse qui regorge de lettres fait moins de place aux chiffres. Benchaâboun qui a roulé sa bosse dans les mathématiques et puis dans les finances a fini, semble-t-il, par s’habituer aux gens qui prêchent dans le désert.
On peut comprendre que la mesure tendant à réduire les droits d’enregistrement au profit du secteur immobilier pourrait être compensée par l’augmentation de l’impôt sur les sociétés et la taxe sur la valeur ajoutée induite par la stimulation des ventes. On peut également comprendre la mesure afférente aux intérêts servis par l’Etat, car elle n’aura pas d’impact sur les recettes fiscales car la mesure a été insérée en dernière minute et non prise en ligne de compte dans les recettes fiscales initiales du PLF 2021. Mais pour les autres amendements, nous attendons toujours la recette du ministre.
Le ministre est également appelé à motiver, conformément aux dispositions de l’article 56 de la loi organique des finances, ses rejets quant aux amendements proposés et tendant à une diminution des ressources publiques. La motivation ne se fait pas par la narration mais par des chiffres issus de travaux de simulation, de requêtes et de projection.
Le parcours de validation de la loi de finances est encore long. Heureusement qu’on ne peut pas franchir le fossé de plein saut. Nous tendons à ce que les parlementaires de la deuxième chambre soient plus exigeants et assouvissent notre curiosité quant à la maîtrise de la méthode Benchaâboun.