Ecrit par Lamiae Boumahrou |
Depuis 2001, l’Etat n’a réalisé aucune opération de privatisation outre les cessions de ses participations. En 2022, les prévisions de privatisation et de cession de 8 Mds de DH n’ont pas été exécutées. L’Agence de Zaghnoun, qui prend en change le dossier des privatisations réussira-t-elle à mieux valoriser les bijoux de famille ?
La crise sanitaire et Ukrainienne, qui se sont succédé, ont sérieusement impacté le budget de l’Etat. Bien qu’en bon père de famille, le gouvernement ait tenté, tant bien que mal, de colmater les brèches. Force est de constater que ces crises, qui persistent, ont bien secoué les finances publiques. Chiffres à l’appui, le déficit budgétaire s’est élevé à 48,1 Mds de DH à fin novembre 2022.
Afin d’atténuer les effets de cette conjoncture et limiter les déficits, un gouvernement n’hésiterait pas à recourir à la privatisation en cédant quelques-uns de ses bijoux, des participations directes ou encore d’ouvrir le capital de certaines entreprises publiques. Un souhait qui ne s’est pas concrétisé depuis plus de 2 décennies, pour le cas du Maroc.
En effet, depuis des années, aucune opération de privatisation n’a été conclue. Seules des opérations de cession des participations de l’Etat ont été menées ces dernières années. Les plus récentes datent de 2021, lorsque l’Etat avait cédé une partie de sa participation dans le capital de Marsa Maroc (35% à TMSA) pour 5,306 Mds de DH et la totalité de sa participation (10,3%) dans le capital de la société « Foncière Université Internationale de Rabat » pour 110 MDH. Quant aux privatisations, la dernière date de 2001, celle de l’Hôtel Madayaq en l’occurrence. D’ailleurs, le seules bien qui figure dans l’historique des privatisations des établissements hôteliers.
La loi des finances 2022 avait pourtant prévu de programmer la cession, en plus des participations de l’Etat dans les entités déjà inscrites sur la liste des privatisables, d’autres sociétés à inscrire sur ladite liste ainsi que la cession des participations minoritaires non stratégiques directes de l’Etat.
Et ce pour une estimation de recettes pour le budget général de l’Etat de 8 Mds de DH dont 3 Mds de DH pour les cessions d’actifs et 5 Mds de DH pour les opérations de privatisation.
Bilan des courses, aucune privatisation ni cession n’ont pas été réalisées. « Il convient de signaler qu’à ce jour, aucune opération de privatisation et de cession d’actifs n’a été réalisée et les prévisions de clôture de l’exercice 2022 ne prévoient aucune réalisation au titre de ce programme », lit-on dans le rapport sur les établissements et entreprises publics accompagnant la LF 2023.
Les raisons selon le rapport, un contexte national et international défavorables marqués par la pression sur le marché en relation avec les effets des tensions internationales.
Mais est-ce seulement une question de conjoncture ou est-ce l’Etat qui n’arrive pas à vendre ses bijoux de famille ?
Une question légitime à l’analyse du bilan des privatisations. Un bilan qui ne reflète pas les intentions de l’Etat. Il faut préciser néanmoins que le programme des privatisations a été relancé en 2018 après 10 ans de mise en veille. Une relance qui a pour objectif non seulement de mobiliser des ressources pour atténuer la pression sur les finances publiques mais aussi pour améliorer la gouvernance de la gestion des actifs du portefeuille des participations de l’Etat.
La question est de savoir si les prévisions de l’exercice 2023 en matière de privatisation seront-elles réalisées ?
A noter que la LF 2023 prévoit la reprogrammation de l’enveloppe prévue au titre de 2022 pour un montant de 8 Mds de DH.
Cette fois-ci, ce n’est pas le ministère des Finances qui prend en charge le dossier mais la nouvelle Agence nationale de gestion stratégique des participations de l’État. Le dossier des privatisations est désormais sur le bureau de Abdellatif Zaghnoun qui sera en charge de mettre en place la stratégie qui sied.
Rappelons que l’ANGSPE a pour principale mission de veiller aux intérêts patrimoniaux de l’Etat actionnaire, de gérer les participations de l’Etat et d’assurer le suivi et l’appréciation des performances des établissements et entreprises. Zaghnou saura-t-il mieux valoriser les bijoux de l’Etat ?
Ce qui est certain, c’est que l’ancien DG de la CDG a du pain sur la planche pour mener à bien la réforme tant attendue du secteur public.