Ecrit par I. B. |
En attendant la mise en place totale du marché commun qu’offrira la ZLECAF aux pays de l’Afrique, le Maroc doit revoir sa stratégie commerciale avec le continent, au moins pour trois raisons : ses exportations vers l’Afrique représentent seulement 5,1% de l’ensemble de ses échanges commerciaux, en plus d’être concentrées à hauteur de 43,5% sur 5 pays africaines, alors que trois pays pèsent pour 77 % de ses importations d’Afrique.
Le marché africain est estimé à 1,5 milliard de consommateurs, pourtant ce ne sont pas les pays africains qui profitent de cette belle ressource. Guère mieux pour le Maroc. Certes les échanges commerciaux entre le Maroc et le reste de l’Afrique ne cessent de croître au fil des années, enregistrant une croissance annuelle moyenne de 6,1% sur la période 2009-2019, selon les données consolidées de la Revue Al Maliya.
Mais ces données montrent quelques dysfonctionnements, notamment la part de ces échanges par rapport au volume global des échanges commerciaux du Royaume qui se situe à 5,1% en 2019.
Fort heureusement, à partir de 2015, le solde commercial du Maroc devient excédentaire.
En effet, les ventes de marchandises à destination de l’Afrique ont presque triplé durant les dix dernières années passant de 8,3 Mds DH en 2009 à 21,6 Mds DH en 2019. Les importations quant à elles s’établissent à 17,9 Mds DH en 2019 contre 3,7 Mds DH en 2009, soit une hausse de de 4,2 Mds DH.
Le solde commercial de ces échanges enregistre un excédent en faveur du Maroc se situant à +3,7Mds DH en 2019 contre un déficit de 5,5Mds DH constaté en 2009, selon la même source. Au cours de la même période, le taux de couverture s’est amélioré de 60,6 points passant de 60,2% en 2009 à 120,8% en 2019.
Ce taux a atteint son niveau le plus haut en 2017 avec 145,6%.
Concentration sur une poignée de marchés
Certes les exportations marocaines à destination de l’Afrique enregistrent un taux d’accroissement annuel moyen de 10% au cours de la dernière décennie, mais l’analyse des principaux clients du Maroc dans le continent africain laisse apparaître une concertation sur 5 marchés qui représentent 43,5% du volume global des exportations du Maroc à destination de l’Afrique en 2019.
En 2019, le Djibouti et le Sénégal sont les premiers clients du Maroc dans le continent Africain avec une valeur de 2,1 Mds DH chacun. Ils sont suivis par la Mauritanie (1,9Md DH), la Côte d’Ivoire (1,8Md DH) et l’Algérie (1,5Md DH).
La diversification de l’offre exportable est également à prendre sérieusement en considération. Par secteur, les exportations du Maroc sont largement dominées par les produits de l’industrie chimique (30,1% du total des exportations en 2019 contre 11,8% en 2009) et celles de l’agriculture, sylviculture, chasse (3,2% en 2019 au lieu de 1,1% en 2009), et ce au détriment des exportations des produits de l’industrie alimentaire (25,1% en 2019 contre 31,9% en 2009), de l’industrie automobile (4,1% en 2019 contre 8,4% en 2009) et de la métallurgie (2,1% contre 5%).
Sur le registre des importations, elles se sont établies à 17,9Mds DH en 2019 contre 13,7Mds DH en 2009 réalisant un taux d’accroissement annuel moyen de 2,7% au cours de la décennie.
Mais là encore, le Maroc est appelé à diversifier ses marchés d’approvisionnement puisque trois pays s’accaparent 77% du total des importations marocaines en provenance de l’Afrique. Par pays, l’Egypte est le premier fournisseur du Maroc au niveau continental avec 36,2% du total des importations en provenance de l’Afrique en 2019, suivie de l’Algérie et de la Tunisie avec respectivement 27,6% et 13,2%.
Par secteur, la structure des importations en provenance de l’Afrique en 2019 est de plus en plus diversifiée.
Plusieurs secteurs commencent à prendre du poids tels que la fabrication d’autres produits minéraux non métalliques (4,5% en 2019 contre seulement 2% en 2009), la fabrication de meubles industries diverses (3% en 2019 contre 0,6% en 2009), et ce au détriment des importations des extractions de houille, de lignite, de tourbe (22% du total des importations en 2009 et 16,2% en 2019) et du raffinage de pétrole et autres produits d’énergie qui passent de 27,1% en 2009 à 22,4% en 2019.
L’avènement de la ZLECAF, lancée en janvier 2021, pose les jalons d’un marché commun pour 54 pays signataires de l’accord de Kigali et plus globalement d’une véritable transformation structurelle du continent.
Le Maroc pays signataire mais n’ayant pas encore ratifié l’accord, en prélude de cette ouverture des marchés africains gagne sérieusement à diversifier son offre (produits manufacturés) mais également ses marchés aussi bien à l’importation qu’à l’exportation.