Année d’élections dans plusieurs pays africains et aux USA, de pandémie… 2020 est une année de défis pour le continent africain. Les avancées réalisées restent malheureusement très peu perceptibles chez les citoyens qui se débattent dans les méandres de l’exclusion, de la pauvreté et des inégalités. L’Africa Talks Mazars, une occasion de faire une radioscopie des défis qui se posent pour notre continent.
La moitié des 10 pays réformateurs dans le monde sont africains, 6 africains sur 10 ont moins de 24 ans, le continent jouit d’une diversité culturelle et d’un grand gisement de ressources naturelles… C’est avec une note d’optimisme que la deuxième édition de l’Africa Talks Mazars a démarré le 25 février à Casablanca. A l’instar de la précédente, la présente édition était marquée par la présence d’éminents experts venus débattre des enjeux politiques, économiques et surtout sécuritaires du continent. D’emblée, 2020 est une année d’élections en Afrique où va se décider l’avenir démocratique. Inutile de rappeler qu’en Afrique, le mot démocratie est en recul pour des raisons connues de tous. Et ce comme l’atteste le taux de participation au vote de ceux qui considèrent que la démocratie ne se mange pas. De surcroît, la prééminence des risques et conflits qui se multiplient sur le continent africain, l’enjeu sécuritaire prime chez bon nombre de citoyens africains. D’autres par contre estiment qu’en la matière, l’Afrique a longtemps subi l’universel et qu’il est temps de voir ce qu’elle peut à son tour offrir et exporter de sa propre vision de la démocratie.
De fil en aiguille, le débat a porté sur pourquoi l’Afrique n’arrive pas à s’assoir à la table des grands pour défendre ses intérêts.
Fathallah Sijilmassi, Ancien ambassadeur et ex-Secrétaire général de l’UPM explique : « Je pense qu’en 2020 et ça été dit et cela continue, il doit y avoir un renforcement endogène durable à travers la coopération Sud-Sud, l’intégration intra-africaine… Il faut tout de même rappeler quelques chiffres : l’intégration régionale en Afrique ne dépasse pas 15%, le continent reçoit 3,5% des investissements internationaux ». Mais pour la moitié pleine du verre, l’Afrique c’est aussi 6 pays parmi les 10 premiers dans le monde ayant une forte croissance économique. Nous pouvons citer également la ZLECA qui se veut un geste politique avant d’être un espace pour développer le commerce intra-africain. Tout cela augure d’une réelle dynamique dans laquelle le Maroc joue un rôle proactif. Autrement dit, l’Afrique n’a pas besoin d’attendre qu’il y ait une politique européenne, américaine ou asiatique, mais la meilleure politique est afro-africaine. Aujourd’hui, il est important que la voix ou les voix africaines (Afrique plurielle) se font entendre auprès de l’UE pour déterminer la relation entre l’Europe et l’Afrique. Si l’Europe veut deux ou trois points de croissance économique, c’est dans le Sud qu’elle les trouvera. Mais plus dans une logique de renforcement des relations et pas de développement. Dans ce sens, un changement de paradigme, s’avère capital.
Dans les débats, les perspectives économiques de l’Afrique ne sont pas en reste. 2020 s’annonce tumultueuse avec la pandémie du Coronavirus qui n’est pas sans effet sur la croissance économique mondiale et par ricochet sur le commerce mondial. Les pays africains doivent réfléchir d’une manière multilatérale aux moyens de défense de leurs intérêts parce qu’ils ont pratiquement les mêmes problèmes.
Dans ce sillage, Ludovic Subran Chef Economiste, Directeur de la Recherche Economique du groupe Allianz, table sur un taux de croissance économique inférieur à 2% en Afrique. Dans le continent, la dette publique a doublé passant de 30% à 60%. Cela pose un problème pour les pays qui ont une croissance molle parce qu’ils ont des frais et des intérêts à payer outre la croissance qui n’est pas au rendez-vous. Pour ces pays, la situation risque de se compliquer davantage. Effectivement, actuellement les conditions monétaires sont favorables et l’endettement se fait à des taux faibles mais si les taux remontent, le problème de la soutenabilité va se poser avec acuité.
Une chose est sûre: en dépit des avancées réalisées, l’Afrique n’arrive toujours pas à avoir voix au chapitre. Le continent peine à faire émerger une taille critique de « champions nationaux » continentaux suffisamment outillés pour s’imposer dans l’arène de la compétitivité internationale.