Ecrit par Lamiae Boumahrou |
En l’absence d’une Agence nationale du médicament, que ne cessent de revendiquer depuis des années les professionnels du secteur pharmaceutique, le Maroc risque de perdre son opportunité de se positionner en tant que leadership de l’Agence africaine du médicament (AMA) récemment créée. En proposant d’abriter le siège de l’AMA, le Maroc cherche-t-il à rattraper son retard ? Analyse.
Lors de la 40è session ordinaire du Conseil exécutif de l’Union Africaine qui s’est tenue le jeudi dernier, Nasser Bourita, ministre des Affaires étrangères, de la Coopération africaine et des Marocains résidant à l’étranger a affirmé que le Maroc était disposé à abriter le siège de l’AMA et à développer des projets de partenariat Sud-Sud avec le CDC-Afrique.
Le ministre a également affirmé que le Maroc est prêt et disposé à accompagner l’AMA dans tous les processus d’opérationnalisation et apportera son soutien à la Conférence des États parties de l’AMA prévue au cours du 2ème trimestre de 2022 pour l’opérationnalisation immédiate de l’Agence africaine des médicaments.
Sauf qu’en l’absence d’une Agence nationale du médicament, cette ambitieuse proposition risque de tomber à l’eau. Cela fait des années que les professionnels du secteur ne cessent de réclamer cette Agence mais en vain. Aujourd’hui ce retard risque de coûter cher au Maroc. Surtout que les dés sont déjà jetés.
Qu’attend donc le Maroc pour créer son Agence nationale du médicament ? Qu’est-ce qui bloque réellement ?
Surtout que ce retard n’est pas sans conséquence. En effet, avec la création de l’Agence africaine du médicament (AMA) et en l’absence d’une Agence nationale du médicament, le Maroc passe à côté d’une belle opportunité en l’occurrence le leadership de l’AMA.
« Pendant ce temps, nos voisins magrébins (référence faite à Algérie) ont créé au pas de course leur agence du médicament et se sont lancés dans une course effrénée à la présidence de l’AMA », a décrié Lahlou Filali, DG du groupe Pharma 5 lors d’une rencontre sur le secteur pharmaceutique marocain. Et d’ajouter « c’est un rendez-vous que nous avons avec l’histoire du médicament de notre continent et que nous ne devons manquer sous aucun prétexte ».
Rappelons que l’AMA a été créée pour accélérer la lutte contre les faux médicaments, faciliter l’accès aux vaccins et aux médicaments sûrs et efficaces ainsi que de devenir l’un des systèmes de réglementation des médicaments les plus efficaces et plus modernes au monde.
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Le lancement de la Zlecaf le 1er janvier 2021 devait pourtant marquer le début d’une nouvelle ère des échanges commerciaux entre les différents pays du continent africain. Un an après, le Maroc à l’instar des autres membres de la Zlecaf, compte tirer profit de cette nouvelle zone de libre-échange africaine. Un marché commun de 1,2 milliard de consommateurs qui offre de belles opportunités de croissance. Parmi les secteurs qui aspirent à occuper des places de choix celui de l’industrie pharmaceutique. Les opérateurs du secteur se disent en mesure de se positionner en tant que leadership du secteur pharmaceutique africain.
Mais c’est sans compter avec ce frein de taille. Et pourtant, l’idée de la transformation de la Direction du médicament en une Agence nationale germe depuis plusieurs années sans aboutir.
Avec la Zlecaf, le Maroc et plus particulièrement le secteur pharmaceutique, a une belle fenêtre de tir pour renforcer son positionnement sur le continent et par conséquent booster sa part d’exportation des médicaments. Faut-il rappeler que le Maroc n’exporte que 10% de sa production nationale du médicament soit à peine 1 Md de DH ce qui est très en dessous du potentiel du secteur pharmaceutique. Une secteur qui pourrait facilement multiplier par 10 son chiffre d’affaires à l’export.
Mais pour se faire, le Maroc doit en urgence créer ladite Agence d’une part et d’autre développer une véritable diplomatie marocaine pour garantir au Maroc une place de choix au sein de l’AMA.
Surtout que le Maroc a toutes les chances pour se positionner comme leader africain en matière de fabrication des médicaments génériques mais aussi de vaccins notamment avec le lancement des travaux de réalisation de l’usine de fabrication de vaccins. Le ministère de la Santé va-t-il rattraper son retard et lancer enfin cette Agence tant Attendue ?