Le Conseil de Bank Al-Maghrib (BAM) a tenu le mardi 16 juin sa deuxième réunion trimestrielle de l’année 2020. Voici les principales décisions.
Le Conseil de BAM réuni ce 16 juin, a décidé, après la baisse de 25 points de base en mars dernier, de procéder à une deuxième réduction du taux directeur de 50 points de base, le ramenant à 1,5%, et de libérer intégralement le compte de réserve au profit des banques.
Dans le même sens, Bank Al-Maghrib a mis en place des dispositions spécifiques pour fournir un appui au refinancement des banques participatives et aux associations de microcrédit.
Ces nouvelles décisions, conjuguées aux différentes mesures d’assouplissement déjà mises en œuvre, notamment l’élargissement du collatéral éligible à ses opérations de refinancement, le renforcement de ses programmes non conventionnels, ainsi que l’allègement temporaire des règles prudentielles, devraient contribuer, avec celles prises par le Comité de Veille Economique, à atténuer l’impact de la pandémie et à soutenir la relance de l’économie et de l’emploi.
Au regard de la conjoncture particulière qui prévaut actuellement, la Banque veillera, plus que par le passé, à la transmission de ses décisions à l’économie réelle et fera le point régulièrement à ce sujet avec le plus haut management du système bancaire, mais déjà, elle a affiné le cadre de ses opérations de refinancement pour favoriser davantage les banques qui déploient le plus d’efforts dans ce sens.
Indicateurs nationaux
Le Conseil a noté qu’après s’être établie à 1,4% en moyenne au premier trimestre 2020, l’inflation, mesurée par la variation du nouvel indice des prix à la consommation base 100 en 2017 mis en place par le HCP en mai dernier, est revenue à 0,9% en avril en lien essentiellement avec le repli des prix des carburants et lubrifiants.
A moyen terme, et dans un contexte de faibles pressions inflationnistes émanant de la demande et des cours bas des matières premières, elle se maintiendrait, selon les prévisions de BAM, à un niveau modéré autour de 1% aussi bien en 2020 qu’en 2021. Sa composante sous-jacente, mesurant la tendance fondamentale des prix, devrait passer de 0,5% à 0,8% en 2020 et revenir à 0,7% en 2021.
Pâtissant de l’effet conjugué de la sécheresse et des restrictions pour limiter la propagation du Covid-19, l’économie accuserait, selon les projections de Bank Al-Maghrib, une contraction de 5,2% en 2020, la plus forte depuis 1996.
La valeur ajoutée agricole connaîtrait un recul de 4,6%, avec une récolte céréalière estimée par le Département de l’Agriculture à 30 millions de quintaux, et celle des activités non agricoles diminuerait de 5,3%.
En 2021, la croissance marquerait un rebond à 4,2%, avec une augmentation de la valeur ajoutée agricole de 12,4%, sous l’hypothèse d’une production céréalière de 75 millions de quintaux, et une amélioration du rythme des activités non agricoles à 3,1%. Au regard de l’évolution rapide et incertaine de la situation, ces prévisions restent entourées de fortes incertitudes, avec une balance des risques orientée à la baisse.
En effet, selon les scénarios d’une reprise plus lente de l’activité ou de la persistance de la faiblesse de la demande étrangère et des perturbations des chaînes d’approvisionnement, la récession serait beaucoup plus profonde.
Sur le marché du travail, les dernières données de l’enquête nationale sur l’emploi ont été collectées par le HCP entre le 1er janvier et le 20 mars et, par conséquent, n’intègrent pas l’effet de la pandémie du Covid-19.
Elles font ressortir une création de 77 mille emplois après une perte de 2 mille au cours de la même période une année auparavant, une amélioration du taux d’activité de 45,7% à 46% et une hausse du taux de chômage de 9,1% à 10,5%. Cependant, une enquête ponctuelle réalisée par le HCP du 1er au 3 avril pour appréhender les retombées de la pandémie sur l’emploi indique une destruction de près de 726 mille postes, soit 20% de la main d’oeuvre des entreprises organisées.
Sur le plan des comptes extérieurs, les données provisoires du mois d’avril montrent les premiers signes de l’impact de la crise sanitaire, avec des diminutions de 19,7% des exportations, de 12,6% des importations, de 12,8% des recettes de voyage et de 10,1% des transferts des MRE.
Une relative amélioration serait attendue au second semestre avec la levée progressive des restrictions au niveau national et chez les partenaires commerciaux et les mesures d’appui à la relance, mais celle-ci ne permettrait qu’un rattrapage partiel.
Ainsi, pour l’ensemble de l’année 2020, les exportations accuseraient une baisse de 15,8% globalement, qui concernerait la quasi-totalité des secteurs. En particulier, les expéditions de l’industrie automobile et les ventes du secteur textile et cuir seraient affectées par la perturbation des chaînes d’approvisionnement et l’affaiblissement de la demande étrangère. En parallèle, les importations chuteraient de 10,7%, en lien essentiellement avec l’allégement de la facture énergétique et le repli des acquisitions de biens d’équipement. Les recettes de voyage enregistreraient un fort recul qui atteindrait 60% et les transferts des MRE régresseraient de 25%.
En 2021, les exportations connaîtraient une certaine reprise, soutenue par l’amélioration de la demande mondiale et la progression des capacités de la construction automobile, bien qu’à un rythme moindre que retenu précédemment. Les recettes de voyage et les transferts des MRE devraient marquer des rebonds respectifs de 60% et de 5,2%, traduisant la dissipation graduelle de l’impact du choc de la pandémie. Pour ce qui est des entrées d’IDE, elles devraient revenir à l’équivalent de 1,5% du PIB cette année avant de retrouver leur niveau tendanciel de 3,2% du PIB en 2021.
Réserves en devises
Tenant compte de la hausse importante prévue des tirages à l’international du Trésor, les avoirs officiels de réserve se situeraient à 218,6 milliards de dirhams en 2020 et à 221,7 milliards en 2021, assurant une couverture autour de 5 mois d’importations de biens et services aussi bien en 2020 qu’en 2021.
S’agissant des conditions monétaires, les taux débiteurs ont, selon l’enquête trimestrielle de Bank Al-Maghrib, diminué de 4 points de base à 4,87% au premier trimestre 2020, tirés par le repli des taux assortissant les prêts aux entreprises privées.
Cette baisse devrait se poursuivre au regard en particulier de la mise en place de dispositifs de garantie pour le financement de la relance au taux directeur majoré d’un maximum de 200 points de base.
Concernant le crédit au secteur non financier, il a continué son amélioration avec une augmentation de 6,7% à fin avril, reflétant notamment l’accélération du rythme des prêts accordés aux entreprises non financières privées à 11,4%.
Malgré la contraction de l’activité prévue cette année, son évolution resterait positive, avec une croissance de 1,9% en 2020 et de 2,6% en 2021, grâce aux différentes actions d’appui à la relance économique et aux mesures d’assouplissement de la Banque. Pour sa part, le taux de change effectif réel s’est apprécié au premier trimestre de 0,86%, mais devrait ressortir en dépréciation de 1,6% sur l’ensemble de l’année et de 1% en 2021, résultat d’une dépréciation en termes nominaux et d’un niveau d’inflation domestique inférieur à celui des pays partenaires et concurrents.