Depuis l’annonce de l’Etat d’urgence sanitaire, quasiment tous les chantiers du BTP sont en arrêt. La consommation du ciment a baissé jusqu’à moins de 80% à partir d’avril. Cette crise sanitaire vient noircir d’emblée le tableau d’un secteur qui cumule les maux et dont la guérison risque d’être beaucoup plus compliquée et lente.
En effet, après l’arrêt des chantiers en raison du confinement, le secteur a reçu un nouveau coup de marteau avec la décision de l’austérité budgétaire. Représentant 75% de la commande publique, le BTP serait l’un des secteurs les plus impactés par cette décision. Ce qui ne sera pas sans conséquence sur le chômage puisqu’il est l’un des principaux pourvoyeurs d’emplois avec plus d’1 million d’emplois soit 6% du PIB.
La relance de ce pilier de l’économie n’est pourtant pas si claire. La question qui se pose d’emblée : Les projets du BTP prévus pour l’exercice 2020 seront-ils maintenus ?
Le problème ne se pose pas pour les projets déjà engagés mais ceux dont les appels d’offre ne sont pas encore lancés.
Le courrier datant du 14 avril adressé par le Chef du gouvernement à l’ensemble des ministères, relatif à la rationalisation des dépenses publiques, telle que prévu dans la circulaire signée le jour même à l’issue de la réunion du CVE, ne fait pas allusion à ce secteur qui représente pourtant la plus grande part de la commande publique. 24 heures après ce sont les Collectivités territoriales qui ont reçu pratiquement le même courrier.
Les secteurs prioritaires ont été clairement définis à savoir la Santé, l’Intérieur, la Défense et les projets engagés avec des acteurs internationaux.
Quant aux autres secteurs, la décision reviendrait au ministère des Finances qui devra statuer sur les dépenses qui pourront être engagées ou pas. C’est au cas par cas.
Difficile donc de prendre le pouls d’un secteur qui manque de visibilité, qui a un problème de main-d’œuvre (les employés ont déserté les chantiers) et qui traverse des moments financiers très difficiles.
Contacté par nos soins, David Toledano, Président de la Fédération des matériaux de construction, nous a affirmé que : « il est normal de prioriser les dépenses publiques dans un premier temps mais pas de les réduire. Car si le BTP ne décolle pas c’est toute la machine économique qui sera en arrêt ».
En effet, plusieurs voix se sont levées pour alerter sur la politique d’austérité (bien que Benchaâboun souhaite ne pas parler d’austérité) qui risque non seulement d’asphyxier l’économie (commande publique représente 25% du PIB) mais également de donner une mauvaise image de l’économie marocaine à l’échelle internationale. La question divise même les membres du gouvernement. Il faudra attendre la période de la reprise pour voir comment sera la commande publique.
Cela dit, la reprise du BTP est impérative pour relancer la machine économique et garantir la relance du marché de l’emploi.
« Plusieurs projets très importants sont dans le pipe dans différentes villes du Royaume et qu’il faudra maintenir. C’est pourquoi nous travaillons avec la ministre de l’Habitat sur un référentiel sécuritaire pour limiter la propagation de la pandémie et garantir une reprise de l’activité dans les meilleures conditions », précise David Toledano.
A noter qu’actuellement 80% des sociétés de matériaux de construction et environ 70% des chantiers du BTP sont en arrêt d’activité. Les stocks ne couvriront qu’entre 1 et 3 mois au maximum. D’où la nécessité de faire redémarrer les machines.
Quid de l’immobilier ?
Pour le secteur de l’immobilier la situation est bien plus compliquée. L’année 2020 devait apporter des réponses à la morosité du secteur. Fin des dérogations urbanistiques, non-accès au foncier de l’Etat, approche de l’échéance 2020 pour les incitations fiscales, gestation d’un nouveau programme de logement…, autant de questions qui plongent de plus en plus le secteur de l’immobilier dans le doute. La pandémie du Covid-19 ne fait qu’enfoncer davantage le clou.
« Il y a réellement un manque de visibilité pour le secteur immobilier. A noter que bien avant la crise, la demande était atone et très faible. C’est pourquoi nous travaillons actuellement avec la ministre de tutelle pour trouver des formules de relance afin de faire sortir le secteur de cette crise », précise le président de la FMC.
Il faut dire qu’à moins de 8 mois de l’échéance des incitations fiscales, la réforme de la politique du logement, sur laquelle le ministère est plongé depuis octobre 2019, ne devrait plus tarder.
Et pour cause, la crise sanitaire a apporté son lot de mauvaises surprises. Nous avons appris que plusieurs acquéreurs , conjoncture oblige, seraient désistés de leur acquisition préférant renoncer au 10% de retenue. Le secteur a besoin en urgence de visibilité pour se projeter et pouvoir jouer son rôle de locomotive de la croissance.
« Le Maroc a pu résorber durant les 15 dernières années le déficit de logement notamment dans le social et l’économique. C’est pourquoi il faudra désormais penser à de nouvelles formes de logement pour permettre aux nouveaux d’y accéder tout en tenant en compte la situation actuelle », explique D. Toledano.
Il affirme, tout de même, qu’il ne faut pas espérer une relance fulgurante du secteur eu égard à la conjoncture économique du pays qui risque de durer plus longtemps.
Le rapport stratégique d’Attijari Global Research, intitulé : «Covid-19 : Des lueurs d’espoir au bout du tunnel», présage un repli de la consommation du ciment au Maroc de près de -20,0% passant de 13,6 MT en 2019 à 10,9 MT en 2020. Il prévoit une reprise de l’immobilier qu’à partir du 4ème trimestre 2020.
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Je demande vivement au banques de débloquer les crédits pour la construction relative aux particuliers qui n attendent que l accord de leurs dossiers laissé a l écart pour résoudre les problématiques des investisseurs et porteurs de projets. Notre investissement est aussi un investissement personnel qui embauchera de la main d œuvre en chômage techniques pour le moment.