A quelques mois de la fin de l’exercice 2019, les différentes institutions ont élaboré leurs scénarios prévisionnels de croissance économique. Pour l’exercice 2020, les écarts se creusent.
En se contentant juste des institutions nationales, que ce soit la Banque Centrale, le Haut Commissariat au Plan ou le Centre Marocain de Conjoncture, ils ont tous partagé avec l’opinion publique leurs projections de croissance en prenant en considération les contraintes internes et externes qui pèsent peu ou prou sur le Produit Intérieur Brut, cette production réalisée au cours d’une période déterminée.
L’analyse de près des différents scénarios met en évidence la différence nette entre les taux prévisionnels qui suscite de nombreuses interrogations. Cette différence interpelle dans la mesure où les projections reposent sur des indicateurs fournis par le Haut Commissariat au Plan et sur une conjoncture internationale dont les indicateurs sont généralement fournis par les Institutions de Bretton Woods. C’est dire que les projections devraient être plus ou moins sur la même longueur d’onde.
Si pour l’exercice 2019, les prévisions de croissance économique sont rapprochées, soit 2,7% pour BAM, 2,6% pour le Centre Marocain de Conjoncture et 2,7% pour le HCP, il n’en est pas de même pour les perspectives 2020. Sur fond d’une campagne agricole de 52 Mqx inférieure de 30% à une campagne moyenne, les prévisions de croissance relatives à l’exercice en cours ne dépassent pas les 3% enregistrés en 2018. En dehors de la campagne agricole, l’expansion mondiale perd de sa vigueur. Après une croissance généralisée qui a duré près de deux ans, la croissance mondiale a ralenti depuis le deuxième semestre 2018. La croissance mondiale et le commerce mondial devraient encore ralentir en 2019 à 3,3% et 2,6%.
Prévisions 2020 : Les écarts se creusent
En ce qui concerne les projections 2020, bien qu’elles restent sujettes au cadrage au gré de la conjoncture nationale et internationale, force est de constater que les écarts sont tout de même très importants. En effet, si la Banque Centrale et le HCP projettent des taux respectifs de 3,8% et 3,4%, le Centre Marocain de Conjoncture table sur un taux de 4,6%.
Pour la Banque Centrale, un Produit intérieur brut de 3,8% en 2020 repose sur une stabilité du rythme des activités non agricoles à 3,6% et à un accroissement de la valeur ajoutée agricole de 6,3%, sous l’hypothèse d’une production céréalière de 80 Mqx.
Pour le HCP, les perspectives pour l’année 2020 reposent sur un scénario moyen de la production des cultures céréalières, conforté par la consolidation des autres cultures et de l’activité de l’élevage durant la campagne 2019/2020. Le secteur primaire devrait connaître une légère hausse de sa valeur ajoutée de l’ordre de 4,6%. Elles supposent également la reconduction de la politique budgétaire mise en vigueur en 2019 et prenant en compte la mise en œuvre de la deuxième tranche de la valorisation des salaires.
Pour les analystes du CMC, un taux de croissance économique de 4,6% en 2020 repose sur un redressement notable des activités agricoles après une année de sécheresse. Ils prévoient une hausse du secteur primaire de 9,5% contre -3,7% en 2018. Ces perspectives tiennent également compte d’autres drivers de la croissance et de l’évolution de l’environnement international, mais la campagne agricole reste déterminante.
Cette cacophonie des taux ne pourrait être sans impact sur l’économie marocaine car elle pourrait déstabiliser les opérateurs économiques nationaux ou étrangers. Face à la multiplicité des taux, les investisseurs seraient déboussolés et ne pourraient se fier à leur pertinence.
D’où l’intérêt de revoir les méthodologies, les modèles d’évaluation… pour aboutir in fine à une convergence des taux.
Il ressort également de ce constat une forte dépendance de la valeur ajoutée agricole aux aléas climatiques, bien qu’elle soit confortée par le développement des cultures hors céréalières. En outre, la dynamique des activités non agricoles n’arrive toujours pas à hisser la croissance économique nationale au niveau souhaité. D’où l’impératif de s’affranchir de l’aléas climatique. Le secteur industriel, qui semble être la clé de la relance économique, peine toujours à accentuer sa part dans le PIB, et à enregistrer des valeurs ajoutées stables et incompressibles qui lui permettront de porter la croissance.