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« Cette contrée [la chambre], qui renferme tous les biens et toutes les richesses du Monde ? » Xavier de Maistre, Voyage autour de ma chambre, 1794.
- « Une maison dans les airs, suspendue par des cordes à une étoile », voilà ce dont rêve un confiné, à l’image de Leopardi, en espérant avoir la main heureuse.
- « Que lis-tu » dit la main, le confiné répond à l’instar de Hamlet : »des mots, des mots, des mots ». Irrités, les livres, en souffrance au pied de son lit, demandent à être rangés dans les étagères.
- Un confiné surprend ses cravates entrain de se préparer à l’étrangler pour motif d’abandon.
- Un confiné s’inquiète : ses vêtements sombrent dans la dépression parce qu’elles ne sont plus sa signature sociale.
- Privé de masques, un confiné a décidé de mettre fin à ses jours en restant toute la journée dans les bras de Morphée.
- Ayant oublié les codes d’accès à ses comptes sur la toile, un confiné se laisser aller à scruter ses murs. Il y découvre des applications d’araignée.
- Un confiné peste contre le virus : il ne peut rendre hommage à Sepulveda en lisant un roman d’amour dans un aéroport.
- En relisant Gogol, un confiné se rappelle avoir acquis un manteau. Il le retrouve heureux au placard bien à l’abri des agresseurs.
- Un confiné assidu des réseaux sociaux s’effondre en lisant sur son compte que des milliards d’âmes partagent sa peur du virus. Il n’est pas heureux malgré les innombrables partages.
- Un confiné ne sort pas de peur d’être assommé, comme le personnage de Sepulveda, par un objet jeté par un couple en dispute.
- Incriminant les chauves-souris, un confiné décide de ne plus mettre la tête chez le coiffeur. Chauve qui peut la vie.
- Après avoir lu « Knock », un confiné se met à répéter : « tant qu’on a la santé ». Sa mémoire rectifie : santé…publique.
- A force de lire des livres de Borges, un confiné se constitue prisonnier d’une bibliothèque. Le paradis est désormais à portée de main.
- Souvenir brumeux d’un confiné : un tableau noir et un bâton de craie écrivant un poème ou démontrant un théorème.
- Les pieds du confiné envient ses mains. Aussi, réclament-ils d’être traités sur un pied d’égalité.
- Un confiné a porté plainte contre ses chaussures. Elles l’ont menacé de lui transmettre le virus parce qu’il ne les cire plus.
- Un confiné a surpris ses chemises et pantalons entrain de déclarer son décès tant ils l’ont perdu de vue.
- Refermant « Candide », un confiné se console : nous avons survécu à la rougeole, nous conjurons l’ennui et nous surmonterons sûrement toutes les horreurs.
Par Rédouane Taouil,
Ancien des écoles primaire et secondaire publiques du Maroc
2 Commentaires
Avec ravissement je relis tes extravagances
Boualem
avec plaisir une belle lecture.
amicalement,
Violette