Relance économique, politique budgétaire, PLF 2021, contribution de solidarité… un tour d’horizon avec Mohamed Benchaâboun reçu par le Patronat ce jeudi 26 novembre.
La rencontre du ministre des Finances, Mohamed Benchaâboun, avec les membres de la CGEM ce jeudi 26 novembre a été une occasion pour débattre des mesures prises par l’exécutif et celles à prendre impérativement pour que suite à la pandémie, la relance soit au rendez-vous. Cette rencontre intervient à un moment où le PLF 2021 a déjà été voté par la 1ère chambre.
De prime abord, le ministre entame son propos par la bonne nouvelle relative aux vaccins anti-Covid testés par les différents laboratoires, ce qui est de nature à dissiper l’obscurité régnante depuis plusieurs mois.
Il reste tout de même convaincu que les conséquences fâcheuses de cette pandémie sur le plan socio-économique nous interrogent, à l’instar d’autres pays, sur notre capacité à rebondir face à un stress test grandeur nature auquel jamais l’économie moderne n’a eu à être confrontée.
Plus de 80.000 dossiers traités entre Damane oxygène et Damane relance
Pour Mohamed Benchaâboun, dans cette traversée de désert, soit nous serons ensemble pour relever le défi imposé par la Covid19, soit nous avançons en rangs dispersés … vers un échec annoncé. L’Etat doit assurément mettre en place les mécanismes nécessaires pour redémarrer la machine économique, mais les opérateurs économiques à leur tour doivent continuer à y croire, à investir et créer de la valeur en matière de richesses et d’emplois, sinon les efforts consentis par l’Etat seraient vains, alerte le ministre.
Il faut donc agir en toute responsabilité dans ce contexte marqué par la rareté des ressources. « Chaque DH doit être dépensé de manière judicieuse et efficiente. L’endettement de l’Etat doit être manié avec sagesse pour répondre aux besoins de l’économie sans pour autant hypothéquer l’avenir des générations futures », indique M. Benchaâboun.
Sur le plan international, tient-il à rappeler, il a été noté une forte reprise de l’économie mondiale au 3e trimestre 2020 suite au déconfinement qui a accompagné la 1ère vague. Le taux de croissance de l’économie américaine a bondi de 30% au 3e trimestre après un repli de 30% au second trimestre.
Sur le plan national, on note le bon comportement du secteur minier, la poursuite de l’évolution favorable de l’activité portuaire, la reprise de certaines branches industrielles, l’atténuation de la baisse de la consommation du ciment… et la reprise de la consommation de l’électricité qui atteste de la reprise de l’activité économique.
La conjoncture nationale est ailleurs marquée par l’allégement du déficit commercial suite à la baisse des importations un peu plus rapidement que les exportations. Les avoirs de réserves s’établissent pour leur part à 7 mois d’importations (au rythme des importations d’aujourd’hui). C’est un peu le lot des bonnes nouvelles jusqu’à aujourd’hui.
En ce qui concerne les mauvaises nouvelles, on note un ralentissement de l’investissement par le recul persistant des importations de biens d’équipement de 20% et de l’autre côté la destruction de 580.000 postes d’emplois.
Benchaâboun s’attarde tout de même sur les mécanismes de garantie mis en place par l’Etat. « Nous avons aujourd’hui plus de 80.000 dossiers traités entre Damane oxygène et relance qui totalisent 50 Mds de DH injectés dans l’économie pour permettre aux entreprises de résister et de redémarrer leurs activités ». On note d’ailleurs une hausse de crédits de plus de 7% par rapport à 3% en 2019.
Les grands chantiers de 2021
En 2021, la sphère publique connaîtra l’amorce d’une dynamique de réformes et de restructurations au profit d’une meilleure contribution à la croissance économique. A ce titre, il y a deux textes de loi qui sont en cours de préparation dont celui de la création de l’agence nationale de gestion de participations de l’Etat, précise le ministre.
Aussi, l’investissement public permettra-t-il le financement de grands travaux aux retombées positives pour l’ensemble des acteurs et où le partenariat public-privé jouera un rôle des plus importants.
D’après Benchaâboun, la LF 2021 devrait concilier une triple nécessité : allouer davantage de ressources au profit du social, préserver un niveau d’investissement élevé et contenir le déficit budgétaire inférieur à celui de l’année de la pandémie.
En ce qui concerne la protection sociale, on note quatre domaines d’intervention : l’AMO, la retraite, les allocations familiales et l’indemnité de perte d’emploi qui doivent être traités dans les cinq prochaines années. 2021 sera l’année de lancement de la généralisation de l’AMO qui devra s’étaler sur deux ans en passant d’un système d’assistance médicale (RAMED) à celui de l’AMO identique pour tous.
L’idée principale est que la mise en place de la généralisation de l’AMO devrait être accélérée pour intégrer les 22 millions de Marocains non couverts. Un sacré challenge.
La contribution de solidarité devra rapporter les 5 Mds de DH qui seront versés dans le fonds de la cohésion et de protection sociale qui va gérer la généralisation de l’AMO et la précarité. Dans la foulée, il rappelle à ceux qui craignent la reconduction de cette mesure, qu’elle concerne uniquement l’année 2021.
Dans le même sillage, une des recommandations des dernières assises de la fiscalité intervenant dans le chantier titanesque de la généralisation de l’AMO est la mise en place d’une contribution professionnelle unique (CPU) comme stipulé dans le PLF 2021 à l’adresse de ceux qui paient l’impôt forfaitaire.
L’idée sous-jacente est de simplifier les procédures avec l’Administration et accélérer la généralisation de l’AMO dans les délais impartis.
La seconde nécessité est la préservation d’un niveau élevé de la commande publique de 235 Mds de DH, un chiffre jamais atteint par le Maroc. Le leitmotiv est de créer de la richesse et de l’emploi tout en agissant sur la demande.
Le troisième point consiste à contenir le déficit budgétaire à un niveau inférieur à celui de 2020 (7,5% du PIB). Il est prévu 6,5% en 2021 malgré le fait que nous allons avoir un recul des recettes de 30 Mds de DH et une hausse des dépenses de 30 Mds de DH, précise le ministre. Il s’agit d’un trou de 60 Mds de DH de besoins additionnels soit 6 points de PIB par rapport à 3,5 que le Maroc a l’habitude de faire soit 9,5% du PIB. Pour se limiter à 6,5% du PIB, il faudra mobiliser les 30 Mds de DH. A cette fin, la contribution de la solidarité va générer 5 Mds de DH, les financements innovants quelque 14 Mds de DH et 4 Mds de DH par le biais des cessions d’actions de l’Etat, soit les opérations de privatisations.
Le ministre rappelle que la politique budgétaire menée agit aussi bien sur l’offre que sur la demande et ne peut donc être qualifiée de politique d’austérité comme ne cessent de marteler certains faiseurs d’opinions. Elle se veut une politique volontariste à caractère expansionniste. Toutefois le recours à cette politique doit être limité dans le temps pour des raisons de responsabilité, prévient Benchaâboun.