Ecrit par Imane Bouhrara |
A la fin de cette journée internationale des droits de la femme, j’ai presque envie de dire à chaque femme : Petite princesse descends de ta tour d’ivoire car il ne sert à rien d’attendre le prince charmant sur son cheval blanc vaillant encore moins une licorne pour donner une suite heureuse à ta vie. Personne ne viendra !
Viens, toi, rejoindre le bataillon et là encore « Mon Dieu, gardez-moi de mes amis ! Quant à mes ennemis, je m’en charge ! ».
En réalité, en ce jour et au moment où l’on va nous tresser des lauriers, des femmes meurent de la violence, de la famine, de la guerre, de la maladie ou de tristesse de voir leurs droits élémentaires bafoués. Oui l’injustice tue, au moins, elle extermine l’espoir en un avenir meilleur.
Une journée qui s’apparente à un mur de lamentation tellement la réalité est dépitante. Une journée aussi où les femmes sont encensées à volonté l’espace d’une célébration avant d’être rattrapées par la réalité : aux fourneaux !
Quelle que soit la bonne intention de cette célébration, à l’instar de la Saint-Valentin ou de Noël, cette journée tourne à l’opportunisme commercial pour couler les stocks de petits gadgets, de bijoux ou de roses. A telle enseigne que les femmes elles-mêmes se laissent prendre au jeu.
L’essence même de cette journée est vidée sur l’autel du « Greenwashing » féminin : se donner bonne conscience !
Alors que cela doit être le jour des comptes et le compte n’y est pas vraiment. Inutile de vous miner le moral avec les chiffres.
Mais mesdames, la vie ne vous a donc rien appris ? Vous savez mieux que quiconque qu’on n’est jamais mieux servi que par soi-même !
Alors Mon Dieu, gardez-nous de nos amis… et surtout qu’ils ne fassent rien et qu’ils nous laissent enfin faire.
Puisqu’effectivement, l’on s’attend en ce jour béni que les pouvoirs publics nous promettent monts et merveilles et la société civile nous donne cette belle illusion que cette journée est le couronnement d’une lutte au quotidien… En réalité, la question des droits des femmes n’est pas foncièrement une priorité. Un objectif quelque part sans cadre référentiel ni planning établi encore moins d’actions identifiées. Ni de reddition des comptes par ailleurs !
Nous avons crié (et vite) victoire avec l’avènement de la Constitution mais 11 ans plus tard, la parité devenue constitutionnelle ne l’est en fait que sur le papier. Preuve en est, l’harmonisation des lois avec cette disposition n’est absolument pas à l’ordre jour. Certes, il y a eu d’importantes avancées réalisées au Maroc et grâce au Roi, faut-il insister. Mais alors les autres et nous ?
Maintenant, la question est de savoir si l’on veut le changement ou pas ? Et cette question s’adresse aux femmes d’abord : si oui, faisons ce que nous savons le mieux faire depuis la nuit des temps, batailler pour la vie ! Les droits ne s’offrent pas, ils s’arrachent. N’attendez pas le changement, car vous êtes le changement. Et ce changement a inéluctablement un coût. Un tribut que chaque femme sera amenée à payer.
Petite, mon père m’a dit « Etudies, travailles, soies autonome et après fait ce que tu veux de ta vie ». Il m’a vite armée avec quoi faire face sur ce long chemin de croix à ce que c’est d’être une femme au Maroc comme ailleurs. Il m’a surtout enseigné que pour avoir ce que l’on veut, il faut trimer pour.
Cela m’a surtout appris qu’il ne faut compter que sur soi-même dans la vie pour construire son avenir. Aujourd’hui encore cela relève de la naïveté que de croire ou attendre que le salut vienne des autres.
Non, il ne faut pas attendre l’instauration de la parité pour espérer un jour avoir une place au soleil. Non, il faut trimer et se forger un chemin pour contribuer à la construction de cette parité. Ne laissez pas votre destin entre les mains des autres, saisissez-le.
En réalité c’est la somme des parcours de milliers et de millions de femmes qui gravera dans le marbre la voie pour les générations à venir. Et c’est de notre devoir d’y travailler sinon c’est du goût amer de l’échec que nous abreuverons les femmes à venir.
Et c’est là qu’il faut se charger des ennemis. Charger les hommes pour nos malheurs c’est vraiment se tromper de combat, car ce qui plombe les droits des femmes l’est également pour les droits de l’homme.
Notre premier ennemi c’est la peur de s’affirmer et d’affirmer ses choix. Plus facile à dire qu’à faire ?
Essayez-vous à dire non et à haute voix. Non à cette main qui essaye de vous harceler dans la rue ou dans votre lieu de travail, Non au mariage de votre petite fille de 11 ans, Non à votre voisin qui bat sa femme, Non à cette mère qui vous amène sa petite fille en bonne à tout faire la privant de son droit à l’école, Non à tant d’injustice dont nous devenons complices par notre silence.
Il faut bien commencer par quelque part et autant commencer par afficher votre opposition à ce qui vous arrive pour essayer d’inverser le cours de la vie… et là où une femme ne peut rien changer, à plusieurs, nous pouvons au moins opérer un début de changement. C’est là où réside l’importance de la solidarité pour faire front commun contre ces ennemis qui ne minent pas uniquement notre quotidien mais les chances de développement de notre pays.
Croyez en l’énergie féminine qui sommeille en vous et dont vous ne soupçonnez même pas l’étendue. Libérez là, le reste suivra naturellement (non sans difficulté non plus).
Alors en ce 8 mars, mon souhait est que chacune prenne la pleine mesure de sa puissance et de sortir de l’ombre enfin ! Agissez pour ne pas subir.
Profitez bien de ce 8 mars aux lendemains toujours douloureux !