La saison III du confinement, celle de trop pour certaines activités économiques et commerciales au Maroc ? Un petit tour dans certaines grandes artères de la ville de Casablanca permet de constater une reprise en douce de certaines activités notamment de services. Un déconfinement progressif se met en place que l’Etat gagne à encadrer.
Psychologiquement, la décision de prolonger l’état d’urgence sanitaire, combien même à raison, de trois semaines supplémentaires est très éprouvante surtout que cela fait deux mois que les plus disciplinés observent un confinement strict. Cette absence de visibilité, induite par ce virus redoutable qui donne du fil à retordre à la communauté scientifique, a entamé le moral des Marocains à l’approche d’Aïd Al Fitr. Mais vaut mieux être triste que mort !
Economiquement cette prolongation l’est encore plus ! La poursuite du confinement est intenable financièrement pour les ménages, et par ricochet socialement. Et ce combien même des mesures de soutien financier ont été mises en place. Sachant que certaines activités et secteurs ont été d’emblée exclus de toute forme de soutien n’étant pas sensé être concernés par une quelconque forme d’arrêt temporaire.
C’est ainsi qu’au lendemain de l’annonce du chef de gouvernement, le 18 mai, devant les deux chambres, de prolongement jusqu’au 10 juin prochain à 18 h de l’état d’urgence sanitaire, certaines activités, notamment celles qui ne font pas l’objet d’une décision administrative d’arrêt à Casablanca, ont redémarré.
Ce mardi 19 mai donc, il y a un fort trafic dans la métropole plus que d’habitude. On peut même constater des embouteillages au niveau de certains croisements de la ville. L’explication est à chercher ailleurs. En effet, plusieurs échoppes ont levé leur rideau ce matin, notamment celles de services. De même que certaines entreprises.
En effet, le chef de gouvernement a été très clair sur le fait que toute entreprise ou activité conforme aux critères sanitaires peut reprendre son activité, en insistant que les commissions composées de plusieurs départements effectuent des contrôles sur le terrain.
Le chef de gouvernement nous apprend également que plusieurs départements en partenariat avec le ministère de la Santé ont élaboré ou sont en train d’élaborer des guides contenant toutes les mesures aussi bien individuelles que collectives à observer pour chaque secteur pour une reprise d’activité en toute sécurité et sans risque sanitaire.
Sauf que la reprise est là, et que l’Etat gagne à l’encadrer via les chambres de commerce, fédérations, pour éviter justement que tous les acquis ne partent fumée et pour nous éviter ce scénario catastrophe qui mettrait en échec la politique nationale d’hospitalisation des cas actifs avec toutes les conséquences qui en découlent.
Le temps politique doit rattraper le temps économique
Pour inédite, la crise sanitaire due au Covid-19 l’est certainement. Et le défi qui se pose aujourd’hui au Maroc est celui de la synchronisation entre le temps politique et le temps économique. L’Etat gagne en effet à dévoiler son plan de relance et de dynamisation économique en y faisant adhérer les petits avant les grands, ne serait-ce que dans la réflexion.
En effet, en plus de la prolongation de l’état d’urgence, l’absence à ce jour d’éléments d’information sur le brainstorming en cours sur la relance économique peut motiver une décision individuelle de reprendre son activité au lieu d’attendre. Quand son grenier est vide, difficile d’attendre Godo.
Surtout lorsqu’on constate que certaines activités notamment informelles se poursuivent malgré l’état d’urgence sanitaire au vu et au su de tous et sans respect d’aucune mesure de distanciation sociale. D’ailleurs nous sommes en train de pays l’indiscipline de ces individus.
Le troisième élément qui nourrit ces appréhensions et pourrait inciter les gens à reprendre leur activité est l’absence à ce jour d’éléments concrets qui leur permettent de conceptualiser la suite des événements.
Certes le HCP a rendu une copie des plus documentées à ce jour sur les scénarios de déconfinement et d’une reprise progressive, mais également le Chef de gouvernement qui a détaillé les quatre axes sur lesquels devrait reposer ce scénario, mais l’opinion publique n’est réellement impliquée dans aucun des chantiers en cours et qui se passent à huis clos. Même les médias ne sont pour la plus part qu’une caisse de résonance aux décisions prises.
Le compte à rebours de cette phase III débutera ce 20 mai. Le gouvernement, ce qui n’exclut en rien la responsabilité du Parlement dans la gestion de cette crise, devrait avoir peaufiné aussi bien sa stratégie de relance que celle de la gestion sanitaire de l’après 10 juin 2020.
Certes le Maroc est à l’expectative comme beaucoup d’autres pays qui attendent de voir comme le déconfinement se passe ailleurs et il faut à tout prix éviter le scénario catastrophe… en même temps les experts sont unanimes qu’il faudra apprendre à cohabiter avec ce virus.
Le Maroc ne peut pas s’offrir le luxe de reporter sine die le déconfinement ou un réaménagement du confinement sans risque pour la stabilité économique et sociale. Le pire est que le nombre de cas ne cesse d’augmenter, les foyers de se déclarer et l’inconscience de certains de miner tous nos efforts…