L’Observatoire international du Commerce Euler Hermes est l’occasion de dresser un panorama de l’économie mondiale. La 7ème édition qui se tient aujourd’hui, 28 novembre 2019 a permis de faire le point sur l’année qui s’achève mais également à tracer les contours de l’année 2020 qui continuera à être marquée par un régime bas du commerce international dans un contexte de protectionnisme accentué.
D’emblée Alexis Garatti, le Directeur de la recherche macroéconomique du Groupe Euler Hermes décrit les trois chocs auxquels les économies font face. Le premier est le choc sur le commerce mondial qui devrait piquer du nez à 1,5 % de progression seulement en 2019 et 1,7% en 2020. Le choc politique exerce de fortes pressions sur les économies du monde auquel s’ajoute un fort interventionnisme monétaire et fiscal.
Résultat des courses : un attentisme des investisseurs alimenté essentiellement par les tensions commerciales entre la Chine et les Etats-Unis d’Amérique et l’incertitude sur l’issue des présidentielles américaines en 2020. Trump serait la principale source de ces troubles.
L’accumulation des dettes dans un contexte de faible croissance se traduit inéluctablement par une progression des défaillances. On s’attend à une moyenne mondiale de 8% en 2019 et 7% pour le Maroc (5% en 2020).
Paradoxalement, cette situation, assez difficile, crée des opportunités à qui sait les saisir. L’agilité des économies notamment émergentes est un atout pour capter ces nouveaux flux de croissance.
Quid du Maroc ?
La 7ème édition de l’Observatoire International du Commerce Euler Hermes se tient sous le thème « Le modèle d’accélération économique du Maroc à l’horizon 2020-2030 ».
Notre pays peut-il faire l’exception, d’autant que ses principaux partenaires sont en ralentissement notamment l’UE sous l’effet du Brexit et une conjoncture mondiale marquée par les fortes tensions sino-américaines.
Comment le pays peut-il capter de nouvelles sources de croissance ? Pour Stéphane Colliac, Economiste Senior en charge de l’Afrique d’Euler Hermes, le mot magique est « réformer » pour bien amorcer le virage de cette nouvelle décennie.
Pour Alexis Garatti, il est important pour tout gouvernement d’être transparent, stable et clair sur les objectifs en termes d’orientations de politique économique. Un atout de taille dans ce contexte mondial trouble. In fine, l’outil monétaire n’est pas le seul à faire jouer puisqu’il permet de maintenir cette stabilité des orientations économiques du pays. Une politique conservatrice et une prudence sur les équilibres macroéconomiques ne seraient finalement pas une si mauvaise chose.
Selon les perspectives d’Euler Hermes, le Maroc tend vers 2% de croissance en 2020 et ne s’inscrit plus sur les mêmes taux de progression de ses exportations, notamment des secteurs comme l’automobile avec un risque pour les entreprises productrices.
Faut-il craindre un risque systémique sur ce secteur, accentué par le fait que les deux principaux donneurs d’ordre sont français ?
Pour Alexis Garatti, ce n’est pas l’axe central de la politique exportatrice du pays qui a une structure de diversification de son offre à l’international assez rassurante.
Pour Stéphane Colliac, le fait même que les donneurs d’ordres soient Français est plutôt un bon point pour le Maroc puisqu’ils sont moins exposés aux exigences environnementales ayant bien évolué sur les normes de production comparativement à des constructeurs allemands.
Il faut également souligner que les défaillances dans les marchés d’exportations du Maroc auront tendance à évoluer de 3% en 2019 et de 4% en 2020.
Les experts d’Euler soulignent également l’accès au financement qui demeure problématique au Maroc. Non pas faute d’offre ou de demande, mais en raison de l’incertitude ambiante et qui n’est pas propre uniquement au Maroc.
La problématique de l’emploi est également mentionnée, l’efficience de l’investissement qui ne se répercute pas en point de croissance, les délais de paiement qui se rallongent de deux jours de plus soit une moyenne de 84 jours…
Il y a tout de même quelques éléments positifs notamment le développement de débouchés vers l’Afrique.
Interpellé sur la décorrélation entre l’évolution dans le classement Doing business et l’évolution des IDE au Maroc, Alexis Garatti estime que ce phénomène de contraction des investissements directs en provenance de l’étranger n’est pas uniquement une spécificité marocaine mais une tendance globale. « La perturbation fondamentale des échanges internationaux s’observe au niveau de la circulation des services et des biens mais aussi au niveau des IDE. Et cette situation devrait se rétablir à la fin des tensions sino-américaines », conclut-il.