Ecrit par Lamiae Boumahrou I
3 mois après les dernières inondations qui ont submergé la capitale économique causant des dégâts matériels inestimables mais aussi des pertes humaines, il n’y a toujours pas de visibilité sur la suite du dossier. Comme à l’accoutumée, les autorités locales brillent par leur silence.
Depuis, on n’en sait toujours pas où en est l’enquête censée révéler à qui incombe réellement la responsabilité de ce qui s’est passé la semaine du 4 janvier mais aussi qui va indemniser les victimes.
Mais ce qui est certain, c’est qu’il y a anguille sous roche laissant en suspens plusieurs questions. Temporisent-ils pour faire oublier cet épisode douloureux pour des milliers de Casablancais en attendant les prochaines inondations et rebelote ? Vont-ils continuer à se jeter la balle en l’absence d’un arbitre pour siffler la fin ?
La sortie médiatique de Abdelaziz El Omari, Maire de Casablanca, à quelques heures des faits se désengageant de la responsabilité et en accusant le délégataire nous avait interpelé à plus d’un titre. Elle n’est qu’une preuve de l’insouciance de nos dirigeants face à leurs responsabilités.
Et pourtant c’est le premier à être responsable puisqu’il est censé être le garant d’une gestion efficience de la ville et de veiller au respect des engagements de tous les délégataires. D’autant plus, c’est l’inefficience de la gestion de la chose publique qui est à l’origine de ces drames.
Dans la foulée, on se demande où en est la révision du contrat avec le délégataire Lydec ? Et si ce retard de révision n’est-il pas à l’origine des inondations que la Capitale économique a vécues et vivra certainement si rien ne change ?
Rappelons que le contrat de gestion déléguée liant le Conseil de la ville à Lydec prévoit une révision quinquennale du contrat pour redéfinir, entre autres, les nouveaux besoins en infrastructures de la ville.
Sauf que la dernière révision remonte à 2009. Et ça sera la première et l’unique révision depuis la signature du contrat de gestion déléguée en 1997. Une révision qui, rappelons-le, avait permis d’établir le programme d’investissement actualisé pour la période 2007-2027; définir un nouvel équilibre économique et financier pour le délégataire et mettre en place des principes de contrôle et de régulation pour le suivi des dispositions du contrat et l’engagement du Délégataire.
Le Conseil avait pourtant annoncé une révision en 2016 qui, à ce jour, n’a pas été faite. Et pourtant, la capitale économique connait une croissance urbanistique qui va plus vite que la capacité de ses réseaux d’assainissement.
Malheureusement, ces nouvelles spécificités ne sont toujours pas prises en considération dans la capacité d’investissement de la Gestion Déléguée qui a été arrêtée pour la dernière fois en 2009 (avenant du Contrat de Gestion Déléguée).
Il ne faut donc pas s’étonner si d’autres inondations s’abattent sur Casablanca causant des conséquences à une allure plus désastreuse.
Où sont les 15 Mds de DH pour la mise à niveau du réseau ?
Lors d’un point presse organisé à l’issue des événements, le DG de Lydec avait pourtant précisé que dans le cadre de l’élaboration du Plan de développement du Grand Casablanca, cette problématique a été partagée, en septembre 2014, avec les autorités nationales et locales. Des besoins d’investissements en assainissement pluvial à l’horizon 2027 s’élevant à 15 Mds de DH environ (Cf. Document de la Commission Habitat & Requalification Urbaine en date d’avril 2014) ont même été actés dans le cadre dudit Plan.
Lire également : [WebTV] Inondations à Casablanca : 15 Mds de DH d’investissement manquent à l’appel !
Et pourtant 6 ans plus tard, les financements nécessaires à cette mise à niveau ne sont toujours pas débloqués. Des solutions de financement avaient été présentées, apprend-on d’une source proche du dossier, notamment l’harmonisation des périmètres de distribution de la gestion déléguée avec un seul opérateur Lydec qui a fait l’objet d’une convention-cadre signée en septembre 2014 devant SM le Roi mais pas encore mise en œuvre.
Il s’agit d’une convention qui stipule que la gestion d’une bonne partie des zones périphériques de la capitale, gérée actuellement par l’ONEE, soit confiée au délégatoire qui assure, actuellement, l’assainissement uniquement. Un manque à gagner qui se chiffre en Millions de DH qui aurait permis de dégager les ressources supplémentaires, à travers la péréquation entre les métiers pour financer les besoins en infrastructures, de rationaliser les investissements en mettant en place des synergies géographiques par métier ainsi que d’améliorer la qualité des services. Il permettrait également la mise en cohérence régionale des tarifs pour les clients ainsi que des frais de participation aux grandes infrastructures pour les aménageurs.
A qui incombe la responsabilité alors ? Qu’attend le Conseil de la ville pour réviser ce contrat et veiller à sa mise en œuvre effective ?
Une question capitale à un moment où une enquête est menée par les instances de l’Etat pour l’activation ou pas du Fonds contre les Évènements Catastrophiques (FSEC) pour indemniser les victimes. Une enquête qui devra prendre en considération tous ces éléments pour statuer sur cette question. En attendant, les ruinés et les lésés des inondations doivent prendre leur mal en patience. Espérons que le ciel sera plus clément.
3 Commentaires
Nous avons pleuré des morts, constaté des dégâts matériels, déploré de nombreuses usines inondées, vu des milliers de véhicules emportés par l’eau.
Ni les communes et ni les sociétés déléguées n’ont été inquiétées à ce sujet pour indemniser les préjudices subis et le gouvernement n’a non plus décrété aucune annonce de catastrophe naturelle.
Alors je me demande qui va profiter des primes payées pour ces risques.
Ces atermoiements sont le signe d’une tendance complice des autorités concernées à faire oublier ‘’l’incident’’ et clore définitivement le dossier.
Au moins les victimes de ces inondations, si ce n’est toute la population de Casablanca, de Tanger, de Tétouane et de Ksar Sghir peuvent se constituer en collectif pour défendre leurs droits auprès des tribunaux comptants. Les associations de toutes natures doivent les appuyer en se constituant parties civiles.
»… tribunaux compétents… »