Ecrit par El Houssaine Houssifi |
Personne n’est éternel. Rien n’est permanent sauf le changement. Le 8 septembre est une date à marquer d’une pierre blanche dans l’histoire du PJD.
Les élections du 8 septembre ont bouleversé de fond en comble la carte politique au Maroc. Les résultats, en chute libre, du PJD ont fait rire à leur tenir les cotes plusieurs, y compris ceux qui partageaient avec eux l’équipe gouvernementale. On la prenait pour une équipe alors qu’il s’agissait en fait d’un panier de crabes.
Mais comment un parti politique qui était considéré comme le haut du panier en devient le dessous ? Comment ce même parti, qui était un ange aux yeux des Marocains, se transforme en un rien de temps en Satan? Mais qu’est-ce qu’il a fait le PJD au bon dieu pour mériter un châtiment aussi sévère?
Nombreux sont ceux qui ont qualifié le score du PJD ce 8 septembre de vote sanction. Mais ce vote aurait dû porter sur toute l’équipe qui était aux commandes. Pourquoi le PJD doit-il être le bouc émissaire de la piètre performance dégagée au terme du mandat?
Un vote rationnel devrait répandre la colère noire du corps électoral sur toutes les couleurs politiques constituant l’équipe gouvernementale sortante et non se focaliser sur le parti de la lampe.
Seuls peuvent fêter leurs résultats les supporters du tracteur et de la balance. N’étant pas aux commandes, le vote massif en leur faveur exprime la nécessité pressante de panteler un air nouveau.
L’attitude du corps électoral mérite une étude sociologique approfondie pour mieux la comprendre et démêler le bon grain de l’ivraie.
La structure du corps électoral nous permet de certifier que le vote n’est nullement fait après appréciation et évaluation des réalisations économiques et sociales. Le grand public accorde peu d’importance aux agrégats économiques et sociaux pour fonder son opinion. Les plus avertis, par méfiance, leur accordent peu de sincérité.
Au Maroc, le corps électoral s’en fout des équilibres macro-économiques, du poids fiscal, du taux de chômage, du taux d’inflation, du taux de couverture des importations par les exportations, de la politique monétaire, de la politique de change… les électeurs au Maroc se forgent une opinion en reposant sur des valeurs que les chiffres ne peuvent pas mesurer.
Il est vrai que l’exercice du pouvoir permet d’user la notoriété et de la popularité d’un parti politique. Confronté aux réalités, ce dernier revoit à la baisse ses ambitions, recadre ses promesses et prend des décisions pouvant d’être qualifiées d’impopulaires (cas du PJD : Caisse de compensation, retraite, fonction publique…). Ceci se passe généralement à l’amorce du mandat. Au fil du temps, il se rattrape pour les faire oublier et ne fait garder dans l’esprit de l’électeur que de bons souvenirs.
Seulement, le COVID-19 a pris le parti de la lampe au collet. Il n’a eu ni le temps ni les moyens pour rattraper son retard. Pis encore, en se laissant-aller, se laissant-faire par le RNI, le PJD a laissé filer le match. Tout au long de la pandémie, le RNI s’est présenté comme le garant de la paix alimentaire, le sauveur des ménages et des entreprises, le protecteur de l’économie nationale : son industrie et son commerce. Pendant que le RNI soigne son image, le PJD dort du sommeil du juste.
Il croit que la baraka court toujours et que nul ne peut le détrôner. Alors que les alliés de la colombe avaient des yeux d’argus voire de lynx, les confédérés de la lampe sortent par les yeux aux Marocains.
Il faut dire que l’effritement du PJD a été entamé bien avant le COVID-19. Ce dernier n’a fait que précipiter l’effondrement. le PJD a perdu depuis la disparition d’Abdellah Baha sans trop déranger les frères et sans trop se soucier de la suite de l’enquête. Le PJD a perdu depuis qu’il a accepté de suppléer El Otmani à Benkirane. Le PJD a perdu depuis l’acceptation de Benkirane de la rente viagère alors qu’il faisait de la lutte contre la rente son cheval de bataille. Le PJD a perdu depuis l’éclatement de l’affaire du couple gouvernemental. Le PJD a perdu avec l’affaire du couple matinal de la Mercedes.
Il a perdu avec les débâcles de Yatime, Maalaaynine et en fin de Ramid et d’Amekraz. Le PJD a perdu lorsque plusieurs de ses responsables n’éprouvent aucun gêne à étaler en public la richesse accumulée, sans aucun doute, sans cause. Le PJD a surtout perdu depuis que ses élus régionaux et locaux ont pris de haut les citoyens. Des erreurs fatales qui ont coûté cher au PJD. A force d’énumérer les erreurs primitives du PJD, je suis saisi de vertige.
Pour certains, ce sont des détails. Mais le corps électoral ne retient que le point noir sur la page blanche. Et faute d’informations, il ne fonde son opinion que sur les détails. Le vote se trouve dans les détails. Le diable lui a cédé sa place.
Les nouveaux élus doivent tirer la leçon du cas du parti sortant. Seulement, la principale leçon de l’Histoire est que l’espèce humaine est incapable d’apprendre. Faites donc attention à vos coalitions, bien choisir les membres de votre équipe gouvernementale, soigner votre image, bien communiquer et surtout parler vrai avec la population. Inutile de la berner en la berçant dans des rêves impossibles.
Mentir est une sottise, non répond l’autre, c’est une politique.