Des milliers voire des millions de DH sont générés chaque jour à travers les transactions e-commerce qui passent entre les mailles du filet du fisc. Un vrai manque à gagner pour l’Etat qui peine à joindre les deux bouts. Pour savoir si la fiscalité e-commerce figure parmi les prochaines priorités de l’administration fiscale, l’équipe EcoActu.ma a posé la question à Khalad Zazou, Directeur de la Législation, des études et de la coopération internationale à la DGI.
Depuis plusieurs semaines, les équipes de Omar Faraj sont sur le pied de guerre non seulement pour mettre de l’ordre et faire appliquer la loi en vigueur mais également pour préparer un rendez-vous tant attendu à savoir les Assises de la fiscalité qui se tiendront les 4 et 5 mai prochains. Des Assises lors desquelles il sera question de mettre à plat tout le système fiscal pour plus de stabilité, d’équité, de transparence, de neutralité de la TVA…
La question est de savoir si outre les sujets classiques, la fiscalité du e-commerce sera-t-elle au menu des Assises ?
Une question légitime dans un Maroc de plus en plus ouvert aux nouvelles technologies faisant fleurir un nouveau business juteux qui échappe encore au radar du fisc.
En effet, le chiffre d’affaires généré par le secteur n’est pas à négliger. Un simple tour sur les réseaux sociaux suffit pour mesurer l’engouement que suscite ce nouveau mode d’achat. Moins cher, plus rapide et surtout plus compétitif que le commerce dit ordinaire. Ce mode cache tout de même bien des irrégularités notamment la vente des produits de contrefaçon, absence de traçabilité des transactions (paiement à la livraison), non-respect des lois sur les consommateurs notamment en cas de litige, mais surtout un commerce hors circuit du régime fiscal.
Contacté par nos soins, Khalad Zazou, Directeur de la Législation, des études et de la coopération internationale à la DGI, nous a affirmé que le fisc se penche actuellement sur la question.
Et d’ajouter que l’administration fiscale a été interpellée à plusieurs reprises sur le sujet qui non seulement a une portée nationale mais aussi internationale. « Le retard accusé en matière de contrôle fiscal du e-commerce ne concerne pas uniquement le Maroc mais se veut une tendance mondiale. Cette question est l’apanage de toutes les administrations fiscales à travers le monde », a-t-il précisé.
D’ailleurs, la première action du Plan d’action sur l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices (BEPS selon l’acronyme anglais) de l’OCDEO est de relever les défis fiscaux posés par l’économie numérique.
« L’administration fiscale est consciente de l’impératif de se mettre à niveau en menant avec la communauté internationale la réflexion pour lutter contre ce phénomène de fraude », précise K. Zazou.
Quid de l’adaptation aux nouvelles tendances ?
En s’inscrivant dans un processus de digitalisation de son économie, le Maroc n’a d’autres choix que de mettre en place les règles de base nécessaires pour mieux contrôler ce canal de commercialisation en pleine émergence. Autrement, la bande de l’informel, qui pèse déjà environ 20% du PIB, ne fera que s’élargir. « L’administration fiscale doit jouer son rôle en contrôlant les entreprises et les particuliers qui opèrent dans le e-commerce. Les possibilités de contrôle existent bel et bien. Malheureusement, l’administration fiscale manque de moyens de contrôle pour surveiller toutes les activités et les personnes à revenus », précise Zaya Mimoun , Docteur en droit public et ex-cadre de la DGI.
Rappelons qu’en l’absence d’une fiscalité spécifique e-commerce mais aussi de contrôle, de plus en plus de commerçants s’orientent vers la vente en ligne qui reste un canal plus compétitif et très rentable. En effet, hormis le coût d’un équipement (ordinateur) et d’une connexion internet, il n’y a aucune autre charge à payer (loyer, IR, IS, TVA…). Pis encore même les entreprises opérant dans le formel détournent la loi d’une façon ou d’une autre pour passer entre les filets du fisc. C’est le cas de certaines boutiques en ligne qui refusent de délivrer une facture pour l’achat d’un bien ou d’un service. Ce qui est hors la loi.
Le DGI doit s’intéresser davantage à ce segment en pleine émergence au Maroc tant qu’il est dans ses débuts.
« Certes les règles de contrôle sont suffisamment claires et exhaustives. Toutefois, il va falloir retravailler, affiner et adapter nos méthodes de contrôle au commerce électronique. C’est pourquoi pour remédier à la fraude, il faut maîtriser le circuit de transaction de l’amont à l’aval soit de la production ou de l’importation des biens jusqu’au consommateur final », a avoué Khalad Zazou.
L’enjeu aujourd’hui est de verrouiller le système et d’endiguer l’hémorragie due à la fraude, aux fausses déclarations et surtout mettre la main sur une manne qui échappe encore à l’Etat. Une manne qui n’est pas encore quantifiable puisque le chiffre d’affaires déclaré du e-commerce est noyé dans les recettes générales.
Et pour cause, la notion e-commerce ne figure ni dans les textes de loi, ni dans des circulaires de la DGI. Elle n’est pas non plus spécifiée dans les déclarations d’impôt. L’identification des recettes générées par le e-commerce nécessiterait beaucoup de travail, nous précise K. Zazou
Le fisc a donc intérêt à couper l’herbe sous les pieds de ceux qui ont choisi le e-commerce pour échapper au fisc. Encore faut-il que ça devienne une priorité pour la DGI ?
Lire également : [Entretien] Discussion à bâtons rompus avec le Directeur général des impôts Omar Faraj
2 Commentaires
Mois je pense qu’il faut instituer une Sous Direction de la DGI, qui sera chargé de l’économie numérique et l’alimenter par des Ressources Humaines RH de qualité pertinente de haut niveau avec la politique Economique et sociale du pays et le développement du digital.
ca suffit fuites et lacunes
Merci Google!