Dans son dernier rapport publié le 11 septembre, la Cour des comptes a mis le doigt sur un point aussi important concernant la commande publique dans son aspect relatif à l’efficacité.
En effet, le présent rapport réprimande l’achat par le ministère de l’Equipement, des Transports, de la Logistique et de l’Eau, de clés USB 32 GO de la marque Kingston à 720 DH l’unité, alors que le prix unitaire de ces clés sur le marché ne dépasse pas 200 DH. Une différence qui interpelle dans un contexte marqué par la rareté des ressources financières où prime la rationalisation de la dépense publique.
L’achat a fait sursauter les magistrats car il s’agit d’un achat via bon de commande. Légalement, l’attribution selon le décret sur le marché public se fait après consultation d’au moins trois fournisseurs. Le moins disant, selon toujours le même décret, se voit attributaire, de la commande. Il s’avère que le ministère de l’Equipement et du Transport, de la Logistique et de l’Eau a fidèlement appliqué les dispositions dudit décret. Le ministère n’est pas tenu d’être regardant sur l’opportunité mais sur la régularité de la dépense. Il faut reconnaître que le cadre juridique d’achat par bon de commande n’est pas bien encadré. D’ailleurs, un seul article lui est dédié au niveau du décret sur les marchés publics.
Les fameuses clés USB ayant enflammé récemment la toile après publication du rapport de la Cour des comptes ne font pas l’exception. Il s’agit d’une défaillance juridique qui peut être également exploitée lors d’un achat par le biais du marché public.
Il est certes vrai que les marchés publics garantissent un tant soit peu la transparence, primordiale dans toutes les phases de la commande publique. Reste la nécessité de préserver d’autres principes essentiels pour ne citer dans ce de figure que l’efficacité et l’optimisation de l’achat public. En cause, en matière de soumission à un marché, les offres financières présentées par les concurrents sont comparées à l’estimation opérée par l’Ordonnateur. Il peut s’agir d’une offre excessive qui fait l’objet d’un rejet ou d’une offre basse qui peut être retenue après présentation de justificatifs par l’entreprise.
En effet, dans son article 41, le décret relatif aux marchés publics parle d’une offre excessive lorsqu’elle est supérieure de plus de 20% par rapport à l’estimation du coût des prestations établies par le maître d’ouvrage pour les marchés de travaux. Du coup, elle est écartée par la commission d’appel d’offres.
L’offre est considérée anormalement basse lorsqu’elle est inférieure de plus de 25% par rapport à l’estimation du coût des prestations établies par l’ordonnateur. Si l’offre est jugée anormalement basse, la commission d’appel d’offres demande par écrit au concurrent concerné les précisions qu’elle juge opportunes. Après vérifications, la commission peut accepter comme rejeter ladite offre.
Mais parfois, on peut se retrouver avec des offres globales financières avantageuses qui renferment des articles présentant des prix jugés excessifs.
Dans un cas pareil, le décret sur les marchés publics stipule que la Commission invite le concerné à justifier le ou les prix lorsqu’ils sont anormalement bas ou excessifs. Mais sans pour autant rejeter l’offre.
Cela dit, bien que l’offre globale puisse être normale, certains de ses prix peuvent présenter un caractère jugé excessif. Dans ce cas l’offre globale est retenue.
D’après un professionnel : « Dans ce type de cas, l’ordonnateur n’est pas en contravention avec la réglementation, mais dans un souci d’efficacité, il est souhaitable de donner la possibilité aux maîtres d’ouvrage de rejeter la partie jugée excessive de l’offre globale ». Et d’ajouter : « Il serait même judicieux de créer un Observatoire de référence des prix pour demander à l’entreprise de s’aligner sur les prix de référence lorsque pareils abus sont constatés ». Il est également temps de réviser la procédure juridique de l’achat par bon de commande pour l’entourer de plus de sécurité, de fiabilité, de transparence…
Eu égard à ce qui précède, nous comprenons que la Cour des comptes, dans sa remarque sur les clés USB, est plus animée par l’opportunité de la dépense que par sa régularité.
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