Ecrit par S. Es-Siari |
Le coup est fatal pour les libraires. Les conséquences de la pandémie sur la soutenabilité des modèles économiques de la librairie sont considérables. Il faut dire que les problèmes ne commencent pas aujourd’hui, les libraires ont dû affronter la crise sanitaire avec une marge de manœuvre limitée.
Un autre secteur souffre en silence à cause de la pandémie liée au Covid-19. Il s’agit bien évidemment des librairies qui sont de plus en plus confrontées à des mutations rapides portées par la numérisation et la croissance exponentielle de l’usage de l’internet. Le phénomène ne date certes pas d’aujourd’hui, mais l’effet amplificateur a eu lieu avec la pandémie.
Dans un reportage réalisé par Medi1TV, il ressort que les professionnels du secteur sont impactés lourdement par les mesures de restrictions imposées par les pouvoirs publics. Aussi, les maisons d’édition font-elles face à un mouvement de numérisation inédit. Un vrai manque à gagner pour le secteur. Les professionnels qui souffraient de la numérisation considèrent la pandémie comme étant le coup de grâce.
« Nous avons espéré que la situation s’améliore après le déconfinement mais elle ne fait qu’empirer avec la persistance de la pandémie et l’apparition de nouveaux variants », alerte un libraire. Les revenus des maisons d’édition baissent à cause de la fermeture des librairies qui n’arrivent plus à joindre les deux bouts.
Les mesures de soutien prises par le gouvernement en faveur des librairies ne sont guère suffisantes. Face à la montée en puissance du numérique, la communauté scientifique déplore un combat perdu d’avance.
Le passage du papier au numérique s’est imposé depuis des années, mais il s’est accéléré avec le numérique. Les chiffres publiés par l’ANRT attestent de cette montée fulgurante. Le taux de pénétration d’internet a atteint 93% en 2021. Le constat est appuyé par ailleurs par les chiffres publiés par l’Association des libraires indépendants du Maroc qui annonce que le marché du livre a affiché en 2020 une baisse de 60% par rapport à 2019.
La situation n’est certes pas propre au Maroc, mais il faut dire que dans notre pays la lecture reste timide étant donné que la majorité des Marocains ne lit pas parce qu’elle n’a pas été éduquée à l’école à la lecture. Si la crise de lecture au Maroc menace réellement la survie des entreprises d’édition et du livre, la numérisation le menace encore plus.
Force est de rappeler que le tirage moyen de livres qui se situait entre 3.000 et 5.000 durant les années 1970, n’est que de 1.000 exemplaires dans le meilleur des cas. Or, lorsque le volume diminue, les prix s’envolent. Un cercle vicieux qui rend la situation plus complexe.
Le commerce électronique de livres numériques va-t-il à se développer plus rapidement compte tenu des habitudes prises lors de la crise ? Comment la librairie peut-elle mieux se positionner sur ce mode de distribution ?
Cette situation d’urgence nécessite une réflexion sérieuse sur l’adaptation de la révolution numérique au rapport entre l’homme et le livre. Elle nécessité également un dialogue avec les acteurs concernés notamment le ministère de la culture, les secteurs de l’enseignement et de l’éducation et pourquoi pas le secteur financier.