Ecrit par Soubha Es-Siari |
Les crises sanitaire et ukrainienne ont perturbé les chaînes de valeur mondiales à telle enseigne que même les économies les plus développées se sont heurtées à des problèmes d’approvisionnement. De ces problèmes est née la nécessité d’assurer la souveraineté alimentaire, énergétique et sanitaire. Le forum économique Maroc-Espagne a été une occasion pour voir comment transformer les menaces en opportunités.
Le forum économique tenu ce mercredi 1er février en marge de la Réunion de Haut Niveau (RHN) Maroc-Espagne a été un moment fort pour savourer les retrouvailles tout en se projetant dans l’avenir. Les deux partenaires sont ainsi déterminés à aller de l’avant et fructifier leur partenariat à l’aune des mutations aussi bien économiques que géostratégiques.
» Une nouvelle ère de nos relations bilatérales s’est ouverte, à travers la position de votre gouvernement concernant nos provinces du Sud. L’Espagne a eu le courage du réalisme historique. Et pour cela, le Maroc vous rend hommage. Nous vivons depuis plusieurs années un désordre mondial, aggravé par une pandémie planétaire, le retour de la guerre en Europe et un réchauffement climatique qui nous affecte tous’, annonce Aziz Akhannouch lors du forum économique.
Bien que cette réunion intervienne dans un contexte marqué par deux crises sévères, les deux pays souhaitent justement identifier les voies de développement tout en exploitant au maximum les synergies existantes et ce dans un partenariat win-win. La perturbation des chaînes de valeur mondiales étant au menu du forum.
Force est de rappeler que l’Espagne est depuis plus d’une dizaine d’années, le premier partenaire commercial du Maroc. Comme en attestent les chiffres : les échanges commerciaux se sont élevés à environ 17 Mds d’euros en 2021 et s’inscrivent en hausse avec des taux de croissance annuels à deux chiffres.
Autre indicateur important : 17.000 entreprises espagnoles ont des relations commerciales avec le Maroc et presque 800 y sont établies. Les responsables marocains sont pour autant conscients qu’il est aussi opportun de convaincre les grands groupes qui hésitent encore à investir au Maroc.
Les investissements marocains en Espagne évoluent aussi et ont tout le potentiel de se développer davantage. Sur ce terrain, la marge de progression demeure importante, que ce soit dans l’énergie, les transports, le tourisme ou l’industrie, notamment à l’aune du dispositif prévu par la nouvelle Charte d’Investissement.
Ces réalisations ne doivent toutefois pas empêcher les deux pays de placer la barre encore plus haut. C’est l’enjeu de la RHN d’aujourd’hui qui se veut un nouveau départ comme prélude à un partenariat Maroc-Espagne rénové et un modèle de voisinage.
Comme l’a si bien dit Chakib Alj, président de la CGEM : « Dans un monde où l’on passe d’une crise à une autre, la coopération entre les voisins et les amis, dans une approche pragmatique et à long terme, est donc plus que nécessaire, elle est indispensable ».
Et d’enchaîner : « La reconfiguration des chaînes de valeur mondiales, dont nous sommes actuellement témoins, est en effet, une réelle piste de croissance pour nos pays respectifs.
D’autant plus que nos complémentarités économiques et notre proximité nous permettent de construire de vrais écosystèmes industriels intégrés, durables et innovants, dans des secteurs stratégiques comme l’automobile, l’aéronautique, l’industrie pharmaceutique ou encore le textile ».
Dans ce cadre, il faut reconnaitre que le Maroc présente aujourd’hui des avantages inédits pour développer de l’hydrogène vert de qualité et, partant, répondre aux besoins énergétiques. La mobilité durable est également un vrai sujet que les deux pays pourraient développer ensembles.
Abstraction faite du contexte géopolitique, les solutions à la perturbation des chaînes de valeur mondiales doivent résider dans les liens régionaux. Pour ce faire, il est impératif d’assurer la stabilité juridique et de converger en termes de normes.
De son côté, Clémente Gonzales, président du CEMAES (Conseil économique Maroc-Espagne ) rappelle que nous vivons une perturbation des chaines de valeur mondiale sans précédent. Les Etats-Unis innovent, la Chine produit et l’Union européenne régule. Dans un contexte pareil, les chaines d’approvisionnement sont de plus en plus petites et les fournisseurs sont de plus en plus proches. Un changement de paradigme s’impose.
Le ministre de l’industrie Ryad Mezzour tout en listant les principales réformes adoptées ou en cours par le Maroc annonce que le Royaume et l’Espagne pourraient devenir la plateforme la plus compétitive aussi bien dans les secteurs automobile que textile.
Aussi, il rappelle le mix énergétique qui sera composé à hauteur de 52% des énergies renouvelables à l’horizon 2035. Des perspectives fort prometteuses pour les deux pays voisins.
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