Impact de la pandémie sur l’économique, mesures d’accompagnement, rôle des chambres de commerce et d’industrie, réforme des chambres, défis à relever,…, tels sont les points abordés avec Omar Moro, Président de la Fédération des Chambres marocaines de commerce, d’industrie et de services (FCMCIS) dans cet entretien.
Ecoactu.ma : Après 7 mois de pandémie, quelle évolution faites-vous de l’impact de la crise sur le secteur du commerce et de l’industrie ?
Omar Moro : À l’heure où on est, on peut affirmer, avec beaucoup de certitude, que la Covid-19 a profondément impacté l’ensemble des activités économiques dans le pays à l’instar de ce qui se passe dans le reste du monde : dans l’industrie, dans le commerce et dans les services. Les chiffres dont nous disposons montrent bien une régression globale des indicateurs de performance.
Sauf que cet état n’est en fait que la face apparente de l’iceberg. Car, le plus grave et le plus originel dans cette pandémie est qu’elle a affecté aussi les modes de consommation et de production et les modes de vie quotidienne qui à leur tour influencent et influenceront à terme l’ensemble des activités économiques, aussi bien en qualité qu’en quantité.
Nous avons la certitude aujourd’hui qu’au-delà des chiffres quantifiables, annoncés ici et là concernant la croissance (en baisse) et le taux de chômage (en hausse), on assiste aussi à un changement structurel de la sphère économique qui nécessitera forcément des adaptations techniques, financières et sociales à plusieurs niveaux et à différentes échelles.
D’ores et déjà, on voit comment des activités toutes entières se sont métamorphosées pour répondre aux contraintes imposées par la coexistence avec la Covid-19, dans le quotidien : au niveau des usines, des écoles, des marchés, des cafés et restaurants …
Ces adaptations demandent des moyens, des compétences et une culture qui n’est pas spontanée et qui demande beaucoup de patience et de sacrifice.
Malheureusement, plusieurs entreprises que nous représentons ne disposent pas de ces ressources logistiques, financières et humaines, soit par manque de moyens, soit par absence de cadre légal, soit par manque de conscience et de formation nécessaires pour être à jour. Ce qui explique, entre autres, les grosses difficultés qu’elles confrontent aujourd’hui et que nous essayons de résoudre, dans la fédération, en partenariat avec les autres intervenants territoriaux et sectoriaux.
Quel rôle la Fédération des Chambres a-t-elle joué pour défendre les intérêts de cette frange du tissu économique ?
La Fédération a joué, joue et jouera un rôle primordial dans l’accompagnement, la prévoyance, la résolution des problèmes liés à la pandémie à plusieurs niveaux.
Notre présence dans le comité de veille, dans les commissions sectorielles et territoriales, ainsi que les permanences de proximité que les directions régionales et provinciales ont accomplies auprès des commerçants, des industriels et des entreprises, sans parler de nombreuses études, enquêtes et campagnes de sensibilisation qui nous ont permis de mieux comprendre le nouvel environnement économique et de faire des propositions réelles et réalisables. Aujourd’hui, tout le monde reconnaît cette grande valeur ajoutée apportée par la Fédération et les CCIS.
Mais, comme je vous ai dit, la pandémie est en train de bouleverser aussi nos modes de vie (production-distribution et consommation). C’est pourquoi je vous ai expliqué que la place de la Fédération et des CCIS est primordiale et indispensable plus que jamais, à la fois comme initiateur, comme intermédiaire, comme porte-parole pour accompagner les entreprises dans ce long processus imposé par la Covid-19 au niveau régalien, financier, logistique, territorial et de formation.
Dans quelle mesure les chambres ont-elles été impliquées notamment dans l’accompagnement des TPE et PME ?
En deux mots, je pourrai vous dire qu’on a été à la fois le thermomètre et l’amortisseur de l’impact de la pandémie.
Vous savez très bien que les TPE et des PME représentent plus de 93% du tissu économique marocain et emploient plus 5 millions personnes. Notre tâche pendant cette pandémie est à la fois de baliser les efforts des pouvoirs publics et de canaliser et standardiser les revendications et les attentes de toute cette franche de population. Et, je peux vous avouer que ce n’est pas une chose facile. Elle nous demande de la patience, de l’énergie et surtout beaucoup de sagesse.
Nous sommes en réunion permanente et en contact permanent avec l’ensemble des intervenants dans les secteurs concernés et sur le territoire. Des écrits ont été adressés aux banques, aux administrations et aux autorités. Des propositions de réformes des textes de loi ont été proposées. Plusieurs ateliers ont été organisés …
Appréhendez-vous une aggravation de la situation des secteurs qui ont été touchés par la pandémie ?
Comme j’ai précisé, le coût économique, financier et social de la Covid-19 est très lourd sur les TPE et les PME. Jusqu’à aujourd’hui, on ne sait pas encore avec exactitude quand le virus va disparaitre. Mais, ce qui est sûr c’est que les choses vont évoluer forcément avec une adaptation structurelle de l’ensemble des secteurs économiques. Et, on sait, d’après l’histoire, que tous les changements structurels laissent des séquelles sur tous les niveaux économiques, financiers et sociaux.
Ceci justifie notre crainte pour les entreprises qu’on représente et qui malheureusement, pour des causes historiques, de conjoncture ou structurelles sont les plus vulnérables puisqu’elles ne disposent pas d’assez de marge de manœuvre.
Le CVE dont vous êtes membre vient d’adopter de nouvelles mesures pour accompagner le secteur de l’immobilier, de l’évènementiel et les parcs d’attraction. Mais qu’en est-il des autres secteurs ?
Il faut saluer cette décision à laquelle nous adhérons et qu’on a défendue à maintes reprises, par conviction que l’autorisation administrative ne doit pas bloquer l’investissement, mais au contraire, elle doit le soutenir, l’épauler et le baliser pour créer les synergies indispensables à la reprise économique, la croissance et le développement.
Où en est la réforme des chambres de commerce ? La pandémie a-t-elle retardé l’agenda de son adoption ?
Je peux vous rassurer que la réforme des chambres de commerce est sur le bon chemin et nous sommes convaincus que les circonstances actuelles vont accélérer les procédures et le processus pour rendre aux chambres la place qu’elles méritent et qu’elles ont mérité, dans le paysage économique national, en les dotant de tous les moyens qui leur manquent pour devenir cet acteur sectoriel et territorial du nouveau modèle de développement voulu par SM le Roi. Aussi différents chantiers sont mis en place avec l’assistance de bureaux spécialisés dans le domaine des systèmes d’information, la numérisation des services, à la veille économique, à l’espace d’entreprise, à la gestion comptable…
Voir également : [WEBTV] CHAMBRES DE COMMERCE : OMAR MORO « LE SECTEUR ENTAME UNE ÉTAPE QU’IL NE FAUT PAS RATER»