Des études menées par des opérateurs de la place estiment le potentiel des OPCI à environ 200 milliards de DH, uniquement au titre du segment « marché de bureaux ».
Après à peu près trois ans d’attente, le lancement des Organismes de placement collectif immobilier OPCI est aujourd’hui acté. Il vient couronner un certain nombre de réformes initiées au cours des dernières années pour aboutir in fine au développement du marché des capitaux.
La rencontre organisée conjointement par le ministère de l’Economie et des Finances et l’Autorité Marocaine du Marché des Capitaux (AMMC) le mardi 11 juin a été l’occasion pour exposer la cadre législatif et réglementaire régissant les OPCI et de décortiquer les avantages qu’offre ce nouvel instrument sur le marché des capitaux marocains à une brochette d’opérateurs du monde de la finance (Autorités de supervision, banques et assurances, entreprises publiques…).
Les OPCI ont pour leitmotiv la construction ou l’acquisition d’immeubles exclusivement en vue de leur location, ainsi que toutes les opérations nécessaires à leur usage ou leur revente. Il peuvent ainsi réaliser dans ces immeubles, les travaux de toute nature, notamment, les opérations de construction, de rénovation et de leur réhabilitation en vue de leur location. La loi précise par ailleurs qu’il n’est en aucun cas possible d’acquérir des actifs immobiliers exclusivement en vue de leur revente. A noter que la période minimale de détention des biens immeubles est de 10 ans.
Au moins 60 % de l’actif d’un OPCI doit être constitué de biens immeubles, droits réels (ces deux catégories d’actifs doivent être évaluées au moins une fois par semestre contradictoirement par deux évaluateurs indépendants), titres de capital de société à prépondérance immobilière ou titres d’autres OPCI. 10 % de liquidités, dépôts ou instruments financiers à caractère liquide (sauf pour les SPI cotées), le reste des actifs financiers (titres et OPCVM actions, obligations…). Dans le respect de la réglementation des changes, il est possible pour un OPCI de détenir des actifs en devises, situés en zone franche ou dans un pays étranger.
Dans son mot d’ouverture, le ministre de l’économie et des finances Mohamed Benchaâboun a rappelé à l’assistance le contexte ayant régi l’élaboration de la Loi de Finances 2019, un contexte marqué par le lancement des bases d’une croissance inclusive. Il argue ses propos par la relance du programme de privatisation, du projet de loi sur le Partenariat Public-Privé (PPP)… Il y a quelques mois, la première émission des sukuks a été réalisée et aujourd’hui nous parlons bel et bien des Organismes de placement collectif immobilier. Toutes ces réformes ont pour toile de fond d’insuffler une dynamique de croissance économique qui profite à tous les pans de la société.
Nous sommes dans une phase de parachèvement des principaux textes réglementaires nécessaires à l’entrée en vigueur de la loi n°70-14 relative aux Organismes de Placement Collectif en Immobilier (OPCI). A ce titre, il est à préciser qu’en plus de la publication des décrets et des arrêtés d’application de cette loi, le cadre fiscal applicable aux OPCI a été complété et amélioré par la Loi de Finances 2019 et le cadre comptable régissant ces organismes a été finalisé. « Le cadre comptable sera probablement annoncé au mois de septembre prochain au Conseil National de la Comptabilité », annonce M. Benchaâboun.
Dans le même ordre d’idées, il annonce que les premiers agréments de trois évaluateurs immobiliers des actifs des OPCI ont été délivrés par le Ministère, et seront bientôt publiés dans le BO. Les agréments des Sociétés de gestion sont en cours de traitement et seront divulgués dans les prochains jours.
A son tour la présidente de l’Autorité marocaine des marchés de capitaux Nezha Hayat a tenu à mettre en exergue le rôle des OPCI dans le développement du marché des capitaux. Elle rappelle à ce titre qu’aussi bien aux Etats-Unis qu’en Europe, ces instruments d’investissements en immobilier ont connu un essor important.
« Ils ont joué un rôle important dans les externalisations des locaux détenus en propre par les entreprises permettant ainsi de mobiliser de nouvelles ressources pour le financement de l’investissement », explique N. Hayat.
Et d’ajouter : « Ils ont permis d’attirer de nouveaux investisseurs locaux et étrangers. Enfin, et contrairement à ce que pouvaient laisser présager les régimes de transparence fiscale adoptés pour ces instruments, ils ont également contribué à la dynamisation des recettes fiscales » .
Quid du régime fiscal des OPCI ?
Cette rencontre a été également l’occasion de mettre en exergue les avantages des OPCI aussi bien du côté des investisseurs et des épargnants que du côté des entreprises.
Du côté des investisseurs et des épargnants, il s’agit d’instrument de placement moderne et de qualité. Du côté des entreprises, les OPCI devraient contribuer au développement d’une offre suffisante et de qualité en matière d’immobilier locatif dans les domaines du commerce et des services, de l’industrie et de l’hôtellerie.
D’ailleurs la question a été posée sur l’étendue de l’immobilier locatif aux écoles, aux centres hospitaliers… A ce titre, il a été expliqué que nous sommes au début du processus et que rien n’empêche dans les deux prochaines années de l’étendre à ce type de locaux à usage professionnel. Le texte de loi pourrait être amendé pour une meilleure adaptation aux différentes mutations. C’est dire que le cadre législatif est évolutif.
Des études menées par des opérateurs de la place estiment le potentiel des OPCI à environ 200 milliards de DH, uniquement au titre du segment « marché de bureaux ». Le retail (centres commerciaux, mall,..), l’hôtellerie et résidences touristiques, les entrepôts et pôles industriels,.. offrent à leur tour des opportunités de développement non moins importantes.
En ce qui concerne la fiscalité adoptée, les intervenants considèrent qu’il s’agit d’un système fiscal incitatif et des plus attractifs.
En 2019, le régime fiscal spécifique des OPCI a connu une nouvelle mesure, un abattement de 60% au lieu de 100% sur les bénéfices distribués aux actionnaires, personnes morales. Quant aux investisseurs particuliers soumis aux règles du droit commun, il est prévu une retenue à la source libératoire de 15% sur les dividendes.
Les dispositions fiscales obligent également les OPCI de distribuer 85% au moins du résultat de l’exercice relatif à la location des immeubles, 100% des produits des actions, des parts sociales et des revenus assimilés perçus, 100% des produits de placements à revenus fixes, ainsi que 60% au moins de la plus-value réalisée au titre de la cession des valeurs mobilières. En matière de TVA, il est à noter que les OPCI sont très peu producteurs de TVA collectée.
Certains professionnels exigent à ce titre un cadre fiscal plus clair et précis comme ce qui est le cas pour les OPCVM.
Les intervenants sont unanimes que la réussite des OPCI nécessite de l’innovation et de l’ingénierie afin que les TPME puissent profiter pleinement de ce nouvel instrument financier.
Encore faut-il que les évaluations soient faites convenablement. Les évaluateurs seront de nouveaux acteurs sur le marché de capitaux qui seront chargés d’évaluer les actifs immobiliers. A ce titre, il a été rappelé que la voie est ouverte aux méthodes d’évaluation adoptées de par le monde.
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