Après 9 mois de négociations, une solution à l’épineux dossier des pensions des députés vient d’être adoptée. Pour le consultant-actuaire Abdelkrim Khiraoui, cette nouvelle formule ne fera pas redresser la situation de la CNRA.
Après un gel des pensions des députés depuis le 1er octobre 2017 suite à un lourd déficit budgétaire de la Caisse nationale de retraites et d’assurances (CNRA), relevant de la CDG, le dossier refait surface. Après 9 mois de négociations, alors que le délai de réflexion était fixé entre 3 et 6 mois, le Président de la Chambre des représentants, Habib El Malki et les présidents des groupes et groupements parlementaires à la Chambre des représentants sont enfin parvenus à une nouvelle formule du régime de retraite des députés basée sur les ressources propres. Il sera question d’adopter une nouvelle proposition de loi annulant toutes les lois antérieures et toutes les initiatives législatives. Le nouveau système de retraite retenu est basé sur de nouvelles normes. Dans un communiqué de la Chambre des représentants, 3 points sont proposés :
- La pension de retraite ne doit être versée qu’à l’âge de 65 ans, et non immédiatement après la perte du statut de parlementaire comme il était le cas.
- La pension mensuelle des membres de la Chambre sera réduite à 700 DH pour chaque année législative, au lieu de 1.000 DH auparavant.
- Et les frais de cotisation seront maintenus à leur niveau actuel afin de ne pas impacter le budget général.
« Selon ces critères, cette pension est incompatible avec toute rémunération, salaire d’un poste ministériel ou autre haute fonction. Cet accord est intervenu dans le souci de veiller à ce qu’aucune réforme ne peut avoir lieu, à travers le recours au soutien public, et ne peut être finalisée, à moins de prévoir une nouvelle formule garantissant un traitement durable de ce système en fonction de ses propres ressources, et sans pour autant solliciter l’appui du budget général », lit-on dans ledit communiqué.
Toutefois, la question qui se pose aujourd’hui : cette formule est-elle la bonne pour redresser la situation de la CNRA qui accuse un déficit de 30 MDH ?
Nous avons posé la question au consultant-actuaire Abdelkrim Khiraoui, qui s’étonne du fait que le communiqué du Président du Parlement ne fait référence à aucune étude actuarielle justifiant le nouvel âge d’entrée en jouissance de la pension de retraite d’un ex-parlementaire, le niveau du montant de la nouvelle pension et le maintien du niveau des cotisations !
«Comme il s’agit d’un régime par répartition, et vu le Turn Over des parlementaires, supposé en principe élevé dans un pays démocratique, le nombre d’ex-parlementaires ne cessera d’augmenter, alors que le nombre des parlementaires en fonction, et donc cotisants, restera constant. Ce qui induit un déséquilibre systématique des finances de la Caisse de retraite. Nous ne pouvons appliquer la capitalisation, car la durée de cotisation (durée du mandat de parlementaire) est très courte pour permettre d’atteindre un capital constitutif de la pension de retraite, suffisant ! », précise-t-il.
Il est vrai que jusqu’à présent cette proposition n’est pas définitive, mais s’inscrit dans le contexte du débat actuel sur la pension de retraite des parlementaires après la fin de leurs missions, pour une longue durée et à partir d’un jeune âge, en dépit des cotisations qui sont limitées dans le temps. Cependant, il est impératif de prendre les bonnes décisions pour garantir la pérennité du système de retraite et pour plus de justice sociale.
Pour Abdelkrim Khiraoui, il existe bel et bien une solution plus pérenne. « La solution définitive est que chaque nouveau parlementaire gardera son régime de retraite de base ( CNSS pour les salariés du privé, CMR pour les fonctionnaires, le RCAR pour les agents des Etablissements publics, nouveau régime des indépendants) auquel il était affilié avant son mandat de parlementaire : il sera considéré comme « un détaché auprès de l’Institution parlement » et cotisera avec une part salariale et une autre patronale, soit égales à celles antérieures, soit basées sur son nouveau traitement au parlement », propose-t-il.
Il faut dire qu’avec une forte augmentation du nombre de retraités et une stagnation des cotisants, comme le précise l’actuaire, cette nouvelle formule ne permettra pas de garantir la durabilité du système de retraite et fera plonger davantage le déficit de la CNRA.