Depuis 2014, la pression sur les changes a eu des conséquences directes sur les entreprises.
En 2017, la hausse des prix des matières premières freine la pression sur les taux de change en Afrique australe, au Nigéria, en Egypte et dans l’UEMOA.
En 2018, l’accalmie est là, mais le risque est omniprésent.
Le choc de la baisse des cours des matières premières, et plus particulièrement de ceux du pétrole à partir de l’été 2014 a déstabilisé de nombreux pays d’Afrique. Le constat est pratiquement le même : outre le ralentissement de l’activité, l’évolution des cours des produits de base s’est traduite par la dégradation des termes de change et des pressions baissières sur la plupart des devises. Dans une étude récente publiée par Coface, les analystes ont souligné que le taux de change des exportateurs de pétrole, Nigéria et Angola en tête, et de ressources minérales (Mozambique, Zambie) ont été soumis à d’intenses pressions conduisant dans de nombreux cas à d’importantes dépréciations. Des dépréciations, qui au demeurant, ne sont pas exemptes d’incidences sur les entreprises. Elles se sont d’ailleurs traduites par une accélération de la hausse des prix des produits importés et une augmentation de la dette libellée en devise.
2017 : une année d’atténuation de la dépréciation
Force est de constater que le mouvement de dépréciation s’est atténué en 2017 grâce à la hausse des prix des matières premières. Toutefois, comme l’indique l’indice des tensions sur le marché des changes déployé dans cette étude, les pressions baissières demeurent importantes dans certains pays (République Démocratique du Congo, Ethiopie, Angola, Libéria, Guinée). Pour les pays les plus dépendants de la rente des matières premières, les déséquilibres relatifs à la sévère détérioration des balances budgétaires et des comptes courants entre 2014 et 2016 continuent d’entretenir la pression sur les taux de change. De plus, avec l’érosion des réserves internationales au cours de cette période, la vulnérabilité à un nouveau choc externe est à surveiller.
Face à une diversité des régimes de change et des différentes réactions face au choc, l’indice de pression des changes (EMPI) est utilisé pour quantifier les pressions sur une devise.
Les résultats pour 2016 et 2017 confirment les importantes pressions subies par les devises africaines lors de l’année 2016, mais révèlent aussi une atténuation de celles-ci l’année suivante. L’amélioration des balances commerciales en 2017, grâce notamment à une augmentation de la production et des prix des matières premières exportées a ensuite permis une relative stabilisation du cours des devises.
En Afrique du Nord, les tensions demeurent fortes (Algérie, Tunisie), mais on observe une amélioration notamment en Libye où la production de pétrole a doublé en 2017 par rapport à 2016.
Pour l’Egypte, frappée par une pénurie de dollars suite à la révolution de 2011, qui a fait fuir capitaux étrangers et touristes, l’EMPI culminait à près de 91% fin 2016. Cependant, après la dépréciation de 50% liée à la flexibilisation du taux de change en novembre 2016, la livre s’est stabilisée et les réserves ont augmenté de 80%. Les pressions se sont ainsi atténuées en Egypte et l’EMPI est revenu en territoire négatif fin 2017.
« Les déséquilibres hérités de la période 2014-2016 entretiennent la pression sur certaines devises. La diminution des réserves continue en Angola où l’écart entre le taux officiel et le taux parallèle du Kwanza demeure et dans la Communauté Economique et Monétaire d’Afrique Centrale où, malgré une relative stabilisation, une dévaluation du franc CFA ne peut encore être définitivement écartée », apprend-on dans l’étude.
Il a été aussi révélé que le niveau médian des réserves de change est tombé à 3,2 mois de couverture. En effet, les réserves très sollicitées pour soutenir les devises depuis 2014, ont fondu. Même les pays qui disposent de réserves importantes ont été affectées à cause de leur dépendance aux matières premières non transformées. Le déclin des réserves peut même être extrêmement rapide, exposant le marché des changes à de très fortes variations. Il s’agit par exemple des pays exportateurs de matières premières agricoles dans un contexte de prix relativement faibles pour certaines cultures commerciales comme le cacao et compte tenu d’une exposition particulièrement forte de l’Afrique au changement climatique. A ces vulnérabilités s’ajoutent le risque politique et l’accélération du cycle de resserrement monétaire aux Etats-Unis qui pourraient de nouveau, intensifier les sorties de capitaux de la région et donc la pression sur les taux de change. En 2018, l’accalmie s’est installée pour l’instant, mais le risque de change plane toujours.