Interviewé par Soubha Es-Siari |
La crise pandémique a pris au dépourvu des pans entiers de l’économie. Le secteur des assurances n’y fait pas exception. Aux risques habituels, de nouveaux risques ont fait irruption et se sont amplifiés en l’absence ou de la rareté des couvertures y afférentes. La crise étant toujours là, quelles pourraient-être les répercussions ? Les mesures prises par le régulateur sont-elles suffisantes ? Comment imaginer la situation post-pandémie ?… Les détails avec Joerg Weber, CEO Allianz Maroc.
EcoActu.ma : La crise sanitaire liée à la Covid-19 s’est abattue sur plusieurs secteurs de l’économie. Le secteur des assurances n’y échappe pas. Pour le cas d’Allianz Maroc, quelles sont les gammes de produits (prévoyance, santé, auto…) qui ont été les plus impactées ?
Joerg Weber : La crise de la Covid-19 a généralement impacté l’ensemble des branches et en particulier, celles touchées directement par le ralentissement des activités couvertes.
Par ordre d’importance, on retrouve le secteur du tourisme avec toutes ses activités annexes et connexes (hôtellerie, transport, restauration, événementiel…) puis le secteur manufacturier et évidemment, l’automobile et l’aéronautique.
Les entreprises les plus impactées ont dû procéder à la mise au chômage partiel ou total de leurs employés, des fois pendant plusieurs mois. Cela a négativement affecté le niveau des primes, surtout en Accident de Travail et en Maladie.
L’arrêt de certains chantiers avec des demandes de suspension de couverture a eu aussi un impact sur le chiffre d’affaires de la branche Construction.
La branche Automobile a subi quant à elle une baisse du chiffre d’affaires due essentiellement à la baisse des nouvelles immatriculations et aux rabais accordés aux clients dans le cadre de l’initiative cooptée par l’ensemble du secteur.
Le baromètre des risques 2021 d’Allianz montre que la pandémie devance aujourd’hui d’autres risques et se situe aux premières loges. Quels sont les produits qui seraient commercialisés par Allianz Maroc pour faire face à ce genre de crises (interruption d’activité, annulation d’évènements,…) ?
Le Baromètre des Risques d’Allianz fait ressortir à l’unanimité le risque pandémique comme le risque principal pour 2021. Nous pouvons nous attendre à voir un intérêt croissant pour les couvertures des risques liés à la santé mais également à la prévoyance, en particulier de la part des salariés lorsqu’il s’agit de contrats collectifs.
A cet effet, nous avons une large gamme de solutions santé Groupe et Individuelles, au Maroc comme à l’étranger, ainsi qu’une panoplie de produits d’épargne/Vie.
L’interruption d’activité et l’annulation d’évènements figurent également parmi les risques principaux auxquels les professionnels n’ont pas pu faire face, en raison de l’absence et/ou de la rareté de couvertures pour ce type de risques, même à l’échelle internationale. Ceci-dit, d’autres mécanismes peuvent voir le jour comme la mise en place de pools de couverture de pandémies.
Par ailleurs, la pandémie de la Covid-19 a généré un environnement très incertain pour les entreprises, engendrant l’apparition de risques nouveaux ou accrus pour les mandataires sociaux, notamment ceux relatifs à une gestion défaillante de la pandémie par les dirigeants.
Au Maroc, Allianz accompagne plusieurs entreprises via des solutions dédiées à la protection des dirigeants face aux événements impliquant leur responsabilité dans le cadre de l’exercice de leurs fonctions.
Nous avons développé une réelle expertise locale avec le soutien de notre Groupe qui dispose d’une expérience avérée dans cette branche avec des millions de dollars de primes émises de par le monde.
Les entreprises font face également à un environnement de cyber-risques en constante évolution dans un contexte où le travail à distance a contribué à favoriser les failles de cyber-sécurité. A ce titre, toujours avec le soutien de notre Groupe, nous proposons des solutions d’assurance et d’assistance qui sont en mesure d’aider les entreprises à se relever suite à un incident cyber.
Maintenant, la crise est toujours là et nous nous attendons à ce que ses répercussions soient beaucoup plus lourdes que ce que l’on pourrait croire.
L’urgence aujourd’hui est de sensibiliser les chefs d’entreprises quant à la sauvegarde et la pérennité de leurs structures afin de pouvoir faire face à des chocs similaires à l’avenir ainsi qu’à la protection de leurs ressources via des couvertures d’assurance adéquates.
Durant l’exercice 2020, année de crise économique, avez-vous constaté un mouvement important de rachat au niveau des produits d’assurance Vie ?
Dans une année inédite telle que celle que nous avons vécue, marquée par la propagation de la pandémie et sous l’effet du ralentissement important de l’activité économique qui s’en est suivi, beaucoup de nos concitoyens ont dû recourir à leur épargne pour pallier à leurs besoins quotidiens.
L’incertitude qui a plané au lendemain du confinement a été un véritable catalyseur pour une frange non négligeable de la population, la poussant à demander le rachat de l’épargne, conformément à la réglementation en vigueur. Nous avons en effet remarqué, au même titre que d’autres compagnies d’assurances, une augmentation du nombre de rachats. Cette dernière s’est atténuée progressivement au fil des mois, probablement grâce à la reprise de confiance des souscripteurs.
Par ailleurs, contrairement au secteur qui a enregistré une baisse au niveau des primes collectées, surtout pour ce qui concerne les versements exceptionnels (dont une partie liée aux résultats financiers de certaines entreprises), nous avons noté avec satisfaction une augmentation importante des primes, nous permettant de prétendre à une part ‘’respectable’’ dans le domaine de l’épargne et d’aborder l’avenir de cette branche en toute sérénité.
Nous pensons que cela est lié à la confiance de nos épargnants dans notre solidité financière (rating AA attribué par les Agences de notation internationales), sans omettre que la gestion de l’épargne qui nous est confiée est assurée par des équipes internationales de professionnels travaillant pour le compte des plus grands gestionnaires d’actifs dans le monde.
Globalement, comment s’est soldé l’exercice 2020 pour votre compagnie comparativement à vos prévisions ?
Malgré une bonne performance au niveau de la branche Vie, notre chiffre d’affaires Non Vie a baissé de 10% notamment sur les branches Automobile, Accident de Travail et Maladie, comme évoqué plus haut.
Cependant, nous sommes en ligne avec les résultats économiques planifiés et ce grâce à l’amélioration de la sinistralité et au plan d’action mis en place dès le début de la crise pour mieux maîtriser nos frais.
Le régulateur du secteur, l’ACAPS, a décidé d’assouplir certaines mesures (provision pour dépréciation des valeurs de placements, la provision pour risque d’exigibilité ainsi que les provisions pour créances et primes impayées,…) pour permettre au secteur de faire face aux conséquences liées à cette pandémie. Ces mesures sont-elles suffisantes pour maitriser l’impact de la crise sur le moyen et long terme ?
Les mesures d’assouplissement provisoires de certaines règles prudentielles permettent au secteur des assurances de continuer à faire face aux conséquences liées à la pandémie et de renforcer sa résilience aux chocs causés par la situation actuelle.
Nous sommes confiants que l’ACAPS, en collaboration avec le marché, continuera de suivre la situation de près en vue de prendre les mesures les plus adéquates afin d’assurer la pérennité du secteur.
Si la réduction du niveau exigé en termes de Provisions pour Risque Tarifaire pourrait être considérée comme la bienvenue sur fond de crise, nous pensons que cette provision constituerait un moyen important pour assurer la résilience du secteur. En effet, l’année 2020 a connu la souscription de plusieurs grands risques à perte par certains acteurs du marché, chose qui, à notre avis, est susceptible de nuire à la résilience financière du secteur sur le long terme.
Quels sont les effets de synergie qui ont été exploités un maximum avec le groupe Allianz pour faire face à cette crise inédite ?
Le groupe Allianz est l’un des plus grands assureurs au monde et dispose d’énormes ressources qui peuvent être déployées si nécessaire. Ses standards en termes de politique de souscription nous permettent d’être plus solides dans ce contexte. Notre sérénité face à cette crise réside dans le fait de se tenir sur les « épaules d’un géant » et de savoir que l’on sera toujours en mesure de respecter nos engagements vis-à-vis de nos assurés et de nos partenaires.
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