Ecrit par Imane Bouhrara I
La pandémie de la Covid-19 a changé le mode de vie des entreprises en imposant le télétravail à des pans d’activité. Au Maroc, cette pratique de télétravail forcé a opéré un changement de mentalité sur les avantages qu’il présente. Sauf que ce basculement rapide n’est pas pris en compte dans la loi.
La pandémie de la Covid-19 et l’état d’urgence sanitaire décrété dès le 20 mars 2020, ont obligé la majorité des entreprises de revoir leur mode de travail pour assurer la continuité de l’activité.
Une année après la pandémie et bien que des entreprises aient repris l’activité en présentiel ou en mode hybride, le télétravail s’est imposé comme un mode de travail à part entière.
En effet, la pandémie a opéré un changement de mentalité et a réduit l’appréhension des chefs d’entreprise au Maroc vis-à-vis du télétravail.
Poursuite des activités malgré les difficultés et contraintes de mobilité de la Covid-19, une productivité assurée, réduction des charges des entreprises et surtout un épanouissement des salariés, dégagés des contraintes d’horaires, de mobilité mais responsabilisés.
A telle enseigne que des entreprises envisagent de maintenir ce mode de travail en totalité, partiellement ou encore en donnant la possibilité aux salariés de choisir.
Pour celles qui optent 100 % pour ce mode de travail, y trouveront finalement leur compte, notamment en réduisant les frais généraux et les dépenses, sauf pour les frais du siège social. Une contrainte à la fois réglementaire et financière pour les entreprises, au Maroc elles sont une majorité de SARL, dans le contexte de crise actuel.
En effet, toute société au Maroc doit avoir un siège social, soit en louant un local en signant un contrat de bail commercial ou via domiciliation. La domiciliation est généralement l’option la plus prisée par les entreprises compte tenu de son faible coût et de sa simplicité. En effet, 72% des entreprises nouvellement créées à Casablanca ont eu recours à la domiciliation au cours de leur phase de démarrage d’après les estimations de l’Association Marocaine des Centres d’Affaires (AMCA).
Il y a lieu de rappeler que la possibilité de créer une entreprise sans adresse physique a été ouverte au Maroc en 2003, à travers la note N°1923 du ministre de la Justice.
Par ailleurs, cette note fixe la durée maximale de domiciliation de société à un délai de 6 mois. Certes, ce délai peut être renouvelé une seule fois. Néanmoins, après l’écoulement de ce délai, si la société ne change pas de siège social elle est réputée dissoute.
La loi 89-17 sur la domiciliation a été promulguée par Dahir N°1-18-110 du 09 janvier 2019, modifiant et complétant la loi n° 15-95 formant Code de Commerce.
Un an plus tard, la Covid-19 vient donner un coup de vieux à cette loi.
En effet, surtout dans le contexte de crise actuel où des entreprises font face à des difficultés financières à cause de la pandémie, certaines sont même en arrêt d’activité, la possibilité d’une domiciliation prolongée (bien que c’est un peu ce qui se pratique au Maroc) doit être prévue dans la loi du moins des dérogations.
Aussi, faut-il intégrer un régime spécifique aux entreprises qui décident d’opter pour 100 % de télétravail dès leur création et celles qui veulent adopter ce mode après des années d’activité.
La loi doit intégrer les changements de comportement des entreprises sous le coup des avancées technologiques, pour anticiper tout risque futur pouvant ébranler l’économie du pays, mais surtout alléger les entreprises des contraintes au lieu de les accabler.
Plus généralement, la mise en place du télétravail de manière permanente ou alternée pose d’autres interrogations pour les entreprises, la loi ne couvrant pas ce mode de travail, notamment en matière d’assurance, de rémunération, d’accident de travail, d’octroi de prime voire même en matière de recrutement.
Ce qui doit inciter les autorités publiques et le pouvoir législatif de plancher sur les textes relatifs à la création d’entreprises pour que le cadre réglementaire ne soit pas en total décalage avec la réalité des entreprises et pour donner toute la flexibilité nécessaire aux entreprises.
Mais l’absence d’un cadre réglementaire n’a pas empêché de grands groupes de donner cette possibilité de télétravail de manière permanente ou alternée à leurs salariés qui en ont exprimé l’envie.