Quelle corrélation entre l’inclusion financière comme facteur d’autonomisation et d’émancipation des femmes ? Comment l’AFD intervient-elle sur ces problématiques ? Quelle approche genre dans la politique stratégique de l’Agence ? Mihoub Mezouaghi, Directeur de l’Agence Française de Développement (AFD), se prête au jeu des questions réponses au micro d’Ecoactu.ma.
Les investissements de l’AFD au Maroc ont atteint en 2018, 405,8 millions d’euros en progression de 59% sur trois ans. L’approche genre y occupe une place importante. En effet, l’AFD a récemment revu sa politique stratégique dans le monde qui fait de l’approche genre un objectif central et « nous sommes engagés non pas seulement à développer les programmes sensibles au genre mais dans une démarche plus profonde où l’ensemble de nos projets doivent avoir un impact positif sur le genre partout où nous intervenons », explique Mihoub Mezouaghi, Directeur de l’Agence Française de Développement (AFD).
Interpellé sur l’impact de l’inclusion économique et sociale comme frein à l’inclusion financière et par ricochet à l’autonomisation des femmes, le Directeur de l’AFD analyse : « Le déficit de l’inclusion financière doit d’abord s’expliquer par le déficit d’inclusion économique et sociale des femmes. Aujourd’hui, à travers le monde, une femme sur trois et bancarisée et le taux d’activité des femmes est inférieur à 50 % ».
Donc on voit bien que la corrélation entre l’activité des femmes et le déficit de leur inclusion féminine. Et cette situation est assez comparable au Maroc si l’on se réfère aux enquêtes du HCP et de Bank Al-Maghrib qui révèlent qu’un tiers des femmes au Maroc sont détentrices d’un compte bancaire et réalisent des opérations de crédit, soit un tiers des femmes sont dans une certaine forme d’inclusion financière.
Sur le marché du travail, la situation est un peu plus contrastée puisque le taux d’activité des femmes est extrêmement faible puisqu’il n’excède pas les 22 %, ce qui est un frein à l’inclusion financière, précise Mihoub Mezouaghi.
A cela s’ajoutent d’autres facteurs aggravants au Maroc, notamment en amont, à savoir le niveau de scolarisation des filles ce qui est en soi un déficit d’inclusion sociale…
Pour améliorer l’inclusion sociale et économique des femmes et par extension leur inclusion financière, l’AFD mène un certain nombre de projets notamment la facilitation de l’accès des femmes à l’emploi, l’accompagnement de la mobilité sociale des femmes. Et à ce niveau, il faut citer le financement du tramway de Casablanca et de Rabat comme facteur d’amélioration de la mobilité des femmes, dont 44 % des usagers sont des femmes, un taux beaucoup plus élevé que pour les autres moyens de transport. Deux exemples qui participent clairement à une meilleure inclusion sociale.
Et comme cité plus haut comme frein d’inclusion sociale, le taux de scolarité est un indicateur fondamental que l’AFD œuvre à améliorer. Notamment en intervenant en milieu rural pour réduire le taux de déscolarisation en partenariat avec le ministère de l’éducation pour développer des infrastructures éducatives dans les régions où ce taux de déscolarisation est le plus élevé.
Sur le plan macro, l’idée développée est qu’une meilleure inclusion des femmes doit intervenir davantage au niveau même des politiques publiques et sectorielles. A ce niveau là, l’AFD est partie prenante de l’initiative du ministère de l’Economie et des Finances qu’est l’aide budgétaire sensible au genre pour une égalité entre femme et homme dans ces politiques publiques.
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