Toutes les parties prenantes mettent les bouchées doubles pour que l’opérationnalisation du registre national des sûretés mobilières (RNSM) durant le premier trimestre 2020, soit une année après la publication au BO de la loi 21-18 relative aux sûretés mobilières.
Après la rencontre du 14 novembre, un atelier de formation sur le RNSM a été organisé ce 20 novembre par le ministère de la Justice, le ministère des Finances le CNEA et la SFI. L’occasion de présenter le nouveau régime juridique de création des sûretés mobilières ainsi que l’utilisation de la plateforme de réalisation des sûretés mobilières.
Les intervenants avaient comme mission de sensibiliser aux implications de la nouvelle loi et à l’impact de l’opérationnalisation du RNSM qui nécessitent que tous les intervenants soient au diapason que ce soient les agents financiers ou les entreprises.
Mohammed Alla, du ministère de la Justice a pris ainsi le temps de dévoiler le RNDM sous toutes ses coutures.
Elargissement du domaine des sûretés
Tout d’abord, il y a lieu de souligner que le législateur a élargi le domaine du nantissement au détriment du gage qui gèle le patrimoine de l’entreprise. Il a également ajouté dans le panier des sûretés d’autres nantissements qui n’étaient pas organisés, à savoir le nantissement de créances et le nantissement de comptes bancaires. Le législateur a également élargi le domaine des sûretés suivant une approche fonctionnelle visant à intégrer d’autres opérations qui ont la même finalité que la sûreté, comme la vente avec clause de réserve de propriété, affacturage, crédit-bail mobilier…
Pour ce qui est des biens susceptibles d’être utilisés comme sûreté, et suivant la nouvelle loi, tous les biens mobiliers du débiteur peuvent être nantis, qu’ils soient des biens corporels ou incorporels, présents ou futurs, déterminés ou déterminables, des biens fongibles ou corps certains, du numéraire ou des droits de créances. Pour le nantissement des produits et matières prévues au Code de commerce, il n’est pas exigé qu’ils figurent dans une liste établie par l’administration comme admissibles à être utilisés comme sûretés. Ces biens peuvent être donnés en garantie pour des créances présentées ou futures, conditionnelles ou éventuelles, que le montant soit fixe ou variable, pourvu que le maximum soit prévu au contrat ou déterminable.
De l’importance du contrat de sûreté
Une attention particulière est accordée au contrat de sûreté. Notamment sur les conditions de fond. A travers ses différentes dispositions, la loi consacre le principe de la liberté des parties de se mettre d’accord sur les éléments essentiels du contrat et des modalités d’assurer son exécution.
Ainsi la loi permet aux parties de décrire de manière générale les objets grevés, qu’ils soient présents ou futurs, sans que les parties n’aient à les individualiser. Ainsi, peuvent-elles modifier le contrat initial en permettant le changement du bien nanti. Les parties peuvent également choisir entre les modes de réalisations prévus par la loi et conclure une promesse de nantissement qui assurera le rang pendant trois ans de la date de son inscription au RNSM.
Concernant les conditions de forme, la nouvelle loi a assoupli les conditions de constitution du gage en épargnant aux parties civiles l’exigence de la date certaine et en consacrant en matière commerciale la liberté de preuve. Pour le nantissement, le RNSM a libéré les parties du formalisme actuel de publicité puisque la loi a instauré un régime de publicité beaucoup plus simple, basé sur l’insertion d’avis de nantissement par la personne intéressée et sans qu’il y ait besoin de produire des documents.
En fait le RNSM assure cinq principales fonctions. D’abord informer les tiers de l’existence d’une sûreté, ensuite déterminer le rang des créanciers de façon beaucoup plus efficace, aussi permettre l’opposabilité du nantissement aux tiers. En quatrième lieu le registre avise les autres créanciers pour défendre leurs droits en cas de réalisation de sûreté et enfin assure des données statistiques facilitant l’évaluation et la prise de décision par les instances publiques.
A la lumière de la nouvelle loi, la publicité au RNSM est effectuée soit par le créancier, soit par le débiteur ou par l’agent de sûreté. Ce dernier est une grande innovation de cette loi. Il s’agit de toute personne physique ou morale agissant au nom et pour le compte des créanciers pour prendre les mesures nécessaires à la constitution, l’inscription, l’administration, l’opposabilité et la réalisation des sûretés. Pour renforcer le rôle de l’agent, la nouvelle loi a prévu trois dispositions essentielles. La première est que les créanciers mandatant ne peuvent exercer les droits que des sûretés ayant reçu la mission de les exercer en leurs noms.
L’agent de sûreté, nouveauté de la loi
Aussi, la cession des droits garantis n’affecte pas les pouvoirs de l’agent de sûreté. Enfin, les sommes versées au compte dudit agent ne peuvent l’objet d’une voie d’exécution. Elles sont exclusivement affectées aux seuls créanciers représentés par lui.
Le créancier, le débiteur ou l’agent de sûreté peuvent également autoriser les notaires, adouls, avocats, experts-comptables et comptables agréés ou les personnes munies de procuration spéciale à cet effet à effectuer les opérations indiquées à leur place.
Mohamed Kiran du ministère des Finances a pris le temps également de répondre aux questions de la salle notamment des opérateurs bancaires, des membres de l’APSF ou encore la CGEM mais également d’entrepreneurs venus comprendre la valeur ajoutée d’un tel dispositif pour l’appréciation du risque et l’octroi de financement essentiellement aux TPE et PME.
Les différentes interventions ont été suivies de nombreuses questions sur les droits des créanciers et les voies de recours en cas de non remboursement de prêts ainsi que sur les termes de conclusions de contrat.
Pour sa part, Mohamed Kiran du ministère des Finances a insisté que le registre sera utilisable si tout se passe bien le premier février 2020 pour accéder aux informations notamment de la part des banques pour apprécier le risque de financement d’une entreprise. Pour l’instant, la consultation du RNSM est gratuite mais toute production de document sera payante pour pouvoir identifier les usagers, mais les montants n’ont pas été arrêtés.
Une autre rencontre est prévue le 5 décembre entre les différentes parties prenantes pour assurer une effectivité de cette loi tant attendue.