Faute d’une réforme fiscale audacieuse qui prône la justice et l’équité, les pouvoirs publics ne savent plus à quel Saint se vouer pour subvenir aux besoins sans cesse croissants. Ils puisent foncièrement dans les comptes spéciaux du Trésor.
La crise sanitaire s’étant abattue sur la quasi-totalité des secteurs économiques entraîne dans son sillage une baisse drastique des recettes fiscales. Depuis quelques mois, les recettes ne font que s’amollir s’établissant, selon les dernières statistiques de la TGR, à 165,06 Mds de DH.
Pour sauver la face et lever un peu le pied sur l’endettement, qui commence à tarauder les esprits même des plus optimistes, les pouvoirs publics recourent aux recettes non fiscales. Elles se sont établies à 35,4 Mds de DH contre 25,2 Mds de DH un an auparavant, en hausse de 40,4% ou +10,2 Mds de DH, en raison notamment de l’augmentation des versements des CST au profit du budget général (18,6 Mds DH contre 4,6 Mds DH il y a un an) et des fonds de concours (4.798 MDH contre 628 MDH), conjuguée à la diminution des recettes de monopoles (8.142 MDH contre 8.921 MDH), des recettes en atténuation des dépenses de la dette (1.332 MDH contre 2.218 MDH) et de la redevance gazoduc (347 MDH contre 802 MDH). Les privatisations n’ayant pas eu lieu cette année à cause justement de la crise économique. Impossible de trouver preneur ou gagner le jackpot dans une période de vaches maigres
La lecture des chiffres fait ressortir que les recettes non fiscales ont été essentiellement gonflées par les recettes provenant des Comptes spéciaux du Trésor (CST). Les recettes des monopoles et participations sont en baisse de 8,7% ou -779 MDH. Ces recettes ont été versées notamment par l’OCP (3,6 Mds de DH contre 2,7 Mds de DH), Bank Al-Maghrib (1.020 MDH contre 782 MDH), l’Agence de la conservation foncière (950 MDH contre 2 MMDH), Maroc Télécom (911 MDH contre 1.531 MDH) et l’ONDA (300 MDH contre 350 MDH).
Malheureusement les recettes non fiscales ne suffisent pas pour combler le déficit budgétaire abyssal qui s’est fatalement détérioré (-50 Mds de DH à fin octobre). D’où le recours de plus en plus intense à l’endettement. D’année en année, le Maroc se trouve pris dans un cercle vicieux sans aucune issue de sortie.
Des espoirs sont nés lors des dernières assises de la fiscalité qui se sont soldées par un certain nombre de recommandations, dix pour être juste. Des mesures à même d’élargir l’assiette fiscale, réduire la pression fiscale, assurer l’équité et la transparence et renflouer les caisses de l’Etat… mais jusqu’à aujourd’hui la loi-cadre sur la fiscalité est tombée dans les oubliettes.
Comptes Spéciaux du Trésor
Faute d’une réforme fiscale audacieuse qui prône la justice et l’équité, les pouvoirs publics ne savent plus à quel Saint se vouer. Ils bouchent les trous comme ils peuvent.
Depuis le déclenchement de la pandémie, il est donc fait appel massivement aux comptes spéciaux du Trésor notamment les Comptes d’affectation spéciale qui de par leur création sont facilement gérables et malléables. Ceux-ci revêtent certes une importance stratégique dans l’accompagnement de la dynamique économique ainsi que dans la gestion des crises mais ils risquent d’être vidés de leur substance et ne pas être affectés à quoi ils ont été créé initialement.
A fin octobre 2020, Le solde de l’ensemble des comptes spéciaux du Trésor s’élève à 6,9 Mds de DH suite à des recettes de 107,6 Mds de DH. Quelle lecture pouvons-nous faire de la situation comptable des comptes spéciaux du Trésor dans un contexte où la crise sanitaire ne s’apprête pas encore à plier bagages ?
Le Fonds Covid-19 créé spécialement pour couvrir les dégâts de la pandémie se solde à 8,47 Mds de DH. C’est pour dire que les pouvoirs publics ont la corde au cou. Ils sont appelés à innover et à actionner d’autres mécanismes de financement parce que la situation ne va pas changer d’ici peu et les retombées de la crise pourraient être plus violentes en 2021.
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