La conférence co-organisée par CDG Capital et l’IDFC sous le thème « Le financement des Objectifs de Développement Durable (ODDs) : Opportunités et défis » a été l’occasion d’approfondir la question des Objectifs de Développement Durable en soulignant les opportunités à saisir et les défis à relever.
Hamid Tawfiki, DG de CDG Capital revient sur les opportunités et les enjeux du financement des ODD et sur comment CDG Capital compte accompagner leur mise en place au Maroc.
EcoActu : Depuis la COP22, l’enthousiasme de la communauté internationale a laissé place à un manque de visibilité notamment sur le plan du financement vert. Cet état de fait n’a-t-il pas influencé le secteur financier marocain qui s’était engagé à accompagner le gouvernement dans la mise en œuvre des Objectifs du Développement Durable ?
Hamid Tawfiki :Tout d’abord, il faut garder à l’esprit que le financement vert ne peut être durable que s’il est ancré dans le paysage local. En d’autres termes, le secteur financier domestique doit participer au financement vert et ne pas laisser le pays dépendre uniquement des bailleurs de fonds étrangers.
Deuxième chose, au niveau national, les banques financent déjà certains projets verts pour ne citer que l’exemple récent de l’usine de dessalement à Agadir, qui aura une capacité de 400,000 m3 soit l’usine la plus importante au niveau du continent. Ce projet a nécessité une enveloppe de 4 Mds de DH co-financé par le public et le privé avec la participation des banques locales pour la partie dette, et des investisseurs financiers locaux pour la partie equity.
D’autre part, il y a eu des émissions d’obligations vertes au Maroc qui ont pour objectif d’orienter l’épargne vers des projets verts. Plusieurs institutions ont émis des greens bonds notamment BMCE, BCP, CAM ou encore Masen qui comme vous le savez opère dans les énergies renouvelables voire durables. Est-ce suffisant ? Je dirais non.
Nous sommes, petit à petit, en train de verdir le secteur financier en installant une sensibilité, une culture, des réflexes qui commencent à intégrer lentement mais sûrement les risques climatiques, á insérer des critères de sélection de projet et á chercher à mieux identifier et mesurer l’impact. Le système financier inclut aussi les assurances, les institutionnels, les gérants d’actifs, les OPCVM, les OPCR, …
Tout cela a été précisé dans une feuille de route qui a été présentée lors de la COP22 et qui en cours de mise en œuvre. Je pense que nous sommes sur le bon chemin mais seulement au début du chemin. Disons que nous sommes sur la bonne voie.
Il y a aussi un autre élément à prendre en considération : l’ouverture sur l’extérieur. Certes nous avons beaucoup à faire en interne et nous avançons à notre rythme mais nous avons à rester attentifs à ce qui se passe à l’extérieur : les nouvelles exigences, voire attentes des investisseurs et les bailleurs de fonds étrangers.
Il faut comprendre leur approche évolutive du financement climat et le financement des ODD. Le sujet du climat qui s’élargit au développement durable est une bonne chose qui, à mon avis, est salutaire et irréversible. Ce n’est pas un effet de mode.
Et pourtant c’est l’impression qui s’est installée depuis 2016. Preuve en est, le Fonds vert pour le climat n’a, valeur aujourd’hui, collecté que 7 Mds de Dollars…
Je pense que nous ne pouvons pas nier le fait que nous n’avons qu’une seule planète et qu’il faut la préserver. Il ne faut toutefois pas oublier tout le chemin parcouru au niveau international avec une prise de conscience réelle même si elle a été tardive (il nous a fallu la 21ème COP pour arriver à un accord). Les bailleurs de fonds, les institutions de développement, les banques commerciales et les investisseurs sont aujourd’hui conscients du rôle qu’ils sont amenés à jouer.
CDG Capital a été accréditée par le Fonds vert pour le climat et intégré l’United Nations Environment Programme Finance Initiative (UNEP FI). Dans quelle mesure cette accréditation vous permettra-t-elle d’accompagner le Maroc dans la mise en œuvre des Objectifs de Développement Durable sur lesquels il s’est engagé ?
CDG est membre cofondateur de l’International Development Finance Club (IDFC) et ce depuis 2011. Cela a forgé notre conviction sur l’importance du développement durable. En effet, le premier sujet sur lequel a travaillé le club a été la finance climat. Plusieurs échanges avec différents membres du club ont eu lieu et nous ont permis de bien saisir les enjeux, et les opportunités y afférentes. Ainsi, nous avons développé une conviction, qui est devenue presque une obsession voire même une nouvelle culture. Ainsi motivé, nous avons présenté notre dossier pour obtenir l’accréditation du fond vert. C’est un exercice assez lourd qui nous a pris plus de 2 ans et nous avons réussi à franchir tous les obstacles et à répondre à toutes les exigences.
Aujourd’hui cette accréditation permet au GCF d’avoir au Maroc un correspondant en qui il fait confiance pour lui présenter des projets qui répondent aux critères de financement vert. Sachant, que ledit Fonds GCF est prêt à prendre les risques que d’autres bailleurs de fonds et investisseurs privés ne peuvent pas prendre, en outre il a une capacité de financer sur des maturités très longues (20 à 30 ans).
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