Ecrit par S. E. |
La relance est aujourd’hui le maître mot. Après l’épuisement des voies de recours via les politiques budgétaire et monétaire, de quelle marge de manœuvre dispose l’Etat pour relancer l’économie et initier un nouveau cycle de croissance ? Les ressources propres de Fonds Mohammed VI pourraient s’avérer insuffisantes.
L’apparition de nouveaux variants du virus en grande mutation ne doit pas retenir toute l’attention des pouvoirs publics. Bien au contraire, dans un contexte empreint de plusieurs risques, la politique publique se doit de se projeter dans l’après pandémie et même aller au-delà pour esquisser le profil des défis à relever au cours de cette décennie. Pour le cas du Maroc, deux questions s’imposent selon les analystes du CMC. Que faire encore dans l’immédiat en 2021-2022 pour renouer avec la reprise et mettre l’économie nationale sur les rails d’avant la survenue de la pandémie ? De même, comment veiller à la cohérence entre de telles mesures à prendre pour arracher les activités de production à la récession actuelle et le souci d’installer l’économie nationale sur un sentier de croissance d’au moins 7 % pour garantir le doublement des richesses à l’horizon 2030. Parce qu’il faut reconnaître que c’est la seule voie possible pour espérer d’une part résorber les graves déficits accumulés durant cette biennale de la crise sanitaire et d’autre part garantir un niveau de vie respectueux de la dignité des citoyens ?
Dans ce cadre, l’épineuse problématique des moyens financiers à mobiliser se pose avec acuité. A noter que depuis le déclenchement de la pandémie, l’Etat n’a pas lésiné sur les moyens. Il a massivement mobilisé tous les leviers de la politique publique pour atténuer les effets de la pandémie aussi bien sur le tissu social que les différents secteurs productifs. « Outre l’institution du Fonds de solidarité se sont ajoutées de multiples facilités administratives en passant par des moratoires fiscaux, l’octroi de la garantie de l’Etat pour contracter des crédits destinées à soulager les difficultés de trésorerie des entreprises, ou la mise en place d’une politique monétaire très accommodante », rappellent à juste titre les analystes du CMC. Sans oublier de mentionner que l’Etat s’est massivement endetté à l’étranger tant au plan multilatéral que sur le marché financier international.
Toutefois, si la multiplication de ces mesures a permis au Maroc de faire face à la crise, il risque de buter sur des écueils si rien n’est fait.
Attention au rétrécissement des marges de manœuvre pour garantir la relance ?
Ainsi, si l’explosion des défaillances d’entreprises conjuguée aux difficultés de remboursement des crédits contractés a eu pour conséquence une progression dans des proportions inédites des créances en souffrance (amenant les agences de notations revoir à la baisse le rating des principales institutions financières nationales), la hausse spectaculaire de l’endettement public. Ce dernier enregistre une forte progression de 14,2 points en 2020 pour représenter quelque 95% du PIB contre un peu moins de 85% en 2019. Ce qui n’est pas sans conséquence sur les marges de manœuvres du secteur public marocain tout entier. A elle seule, la dette du trésor atteint à la fin de l’exercice écoulé 77,6% du PIB contre 64,9% en 2019 correspondant à un additionnel de presque 13 points. Et ce sans prendre en considération les charges de l’endettement qui pèsent lourdement sur le budget.
Les difficultés de financement affecteraient par effet collatéral le secteur privé. Composé pour l’essentiel de TPE-PME, le secteur privé aura du mal à lever les fonds indispensables pourtant à son développement. « C’est que le recul de l’épargne nationale, consécutif à la chute des activités et des revenus des ménages, a eu pour effet de réduire le niveau de leurs dépôts auprès du système financier national rajoutant, de ce fait, aux contraintes déjà importantes qui assaillent la politique de distribution des crédits ! », est-il annoncé. L’Etat a certes institué le Fonds Mohammed VI qui devra servir de levier pour soutenir l’investissement national, mais les ressources propres de Fonds sont bien plus modestes. Une nouvelle génération de réformes s’avère incontournable, pour entre autres, s’attaquer à l’épineuse question de la thésaurisation dont les montants avoisinent les 300 milliards de dirhams à fin mars 2021.