Cette nouvelle émission du Trésor à l’international a été réalisée à des conditions moins avantageuses, comparativement à celle de 2019, dans un contexte particulier lié à la crise Covid-19, et à la perception du marché du risque pays émergents.
Dans une récente note, les analystes de CDG Capital ont procédé à l’évaluation de l’impact de l’emprunt obligataire émis le 24 septembre dernier par le Maroc sur le marché financier international sur les principaux équilibres macro-économiques notamment sur l’endettement extérieur, l’équilibre des finances publiques et les réserves de change.
Il s’agit de la deuxième sortie après celle de 2019 et ce après une longue absence depuis 2014, suite à un changement d’orientation visant à alléger les engagements en devises et à couvrir le besoin de financement sur le marché intérieur.
« En effet, d’une part, les besoins du Trésor se sont globalement réduits grâce à l’engagement de la réforme de la compensation à travers la libéralisation totale des prix des carburants et lubrifiants, et d’autre part, les réserves en devises du Maroc se sont améliorées suite à l’atténuation du déficit commercial, après le démarrage des exportations automobiles et la hausse des IDE », tiennent à rappeler les analystes de CDG Capital, dans l’appréciation de l’emprunt obligataire.
Contrairement à la dernière sortie dont la totalité du montant (1 Md d’euros) a été levée sur la maturité 12 ans, cette nouvelle émission a été répartie sur deux maturités, en l’occurrence 5,5 ans et 10 ans. L’opération a malgré les incertitudes liées à la crise sanitaire connu un franc succès avec un carnet d’ordres dépassant les 2,5 Mds d’euros émanant de 197 investisseurs.
Les dessous de la hausse du spread
En ce qui concerne la hausse du spread à l’émission, les analystes expliquent qu’elle s’inscrit dans un contexte marché qui a connu une évolution particulière au cours des derniers mois à cause de la pandémie.
L’apparition d’une nouvelle vague Covid19 comme en témoignent non seulement les chiffres dans plusieurs pays, mais aussi le discours de plusieurs instances gouvernementales à travers le monde, pourrait expliquer la hausse des spreads à 243 Pbs au courant du mois de septembre.
« Ces tendances ont été également reflétées au niveau du spread de crédit implicite au prix de marché de la ligne euros bonds Maroc, émise en 2019 et dont la date d’échéance est prévue en novembre 2031, montrant ainsi, que le spread du Maroc a suivi le comportement de ceux des pays émergents », explique CDG Capital.
Impact macro-économique
Sur le plan budgétaire, il est estimé que ce nouvel emprunt obligataire à l’international n’aura pas d’impact sur l’équilibre des finances publiques. Le Trésor sera ainsi amené à couvrir le reliquat de son besoin de financement aussi bien à travers des prêts bilatéraux et des tirages à l’international qu’à travers des émissions de bons du Trésor sur le marché local.
Aussi, en ce qui concerne les réserves de change, l’impact sera neutre compte tenu de la sortie de devise du même montant, en remboursement de la tombée obligataire prévue en octobre 2020.
Les analystes appréhendent une hausse de l’endettement extérieur du Trésor public qui devrait augmenter en 2020. Et pour cause, l’importance des besoins en financement suite à la baisse drastique des recettes fiscales en résultat de la crise Covid19 et la part importante de ce déficit, que le Trésor a prévu de couvrir à travers des ressources extérieures dans le cadre de la Loi des Finances Rectificative.
En effet, sur un besoin de financement prévu pour 2020 de 82,8 Mds de DH, 52,6% ou encore 43,6 Mds de DH devraient être couverts par des financements extérieurs. A date, 25 Mds de DH ont été réalisés tenant compte de cette dernière opération.
« Ainsi, selon nos estimations sur la base des levées nettes en devises prévues pour 2020, l’endettement à l’international du Trésor public devrait s’accroitre de 27% en glissement annuel à 205,1 Mds de DH et de 14% du PIB en 2019 à 19% prévu en 2020 », rappellent les analystes de CDG Capital.
Et de conclure : « Cette nouvelle émission du Trésor à l’international a été réalisée à des conditions moins avantageuses, comparativement à celle de 2019, dans un contexte particulier lié à la crise Covid-19, et à la perception du marché du risque pays émergents ».
L’impact sur l’équilibre des finances publiques et les réserves de change ressort quasi-neutre en raison du remboursement prévu en octobre 2020 d’un montant équivalent.
Le montant de la levée limité à 1 Md d’Euro, comparativement aux prévisions des opérateurs du marché des bons du Trésor qui se situaient autour de 2 Mds d’Euro, laisse un reliquat important du besoin du Trésor à financer pour terminer l’année budgétaire 2020. Toutes choses égales par ailleurs, cette situation pourrait induire une légère correction à la hausse des taux relatifs aux maturités moyennes et longues.
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